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Actu - Délestage : une véritable procédure territorialisée s'impose pour éviter les coupures d'électricité

Article ID.CiTé du 27/12/2022



Dans un contexte tendu de crise énergétique européenne qui rend le système électrique français plus vulnérable que les années précédentes, la mise en œuvre d’un plan national de délestage électrique, et ce malgré les mécanismes de réduction de consommation menés, n’est ni exclue ni confirmée.

Pour anticiper l’organisation qu’implique un tel scénario, un groupe de contact « Délestage » de la cellule de crise interministérielle a été installé le 2 décembre 2022, présidé par Dominique Faure, ministre déléguée aux Collectivités territoriales, et coordonné par la préfète Anne Clerc. Les représentants d’associations d’élus, dont France urbaine, sont conviés à chaque réunion suivant un rythme quasi hebdomadaire.

Délester, une mesure nationale exceptionnelle de dernier recours 
Alors que janvier semble être jusqu’ici le mois le plus probable d’occurrence des coupures, il est indispensable de souligner que les écogestes peuvent avoir un impact suffisant, de l’ordre de trois à quatre gigawatts, pour éviter d’y avoir recours. Cependant, dans le cas où le délestage serait nécessaire, il interviendrait par tranche de deux heures maximum lors des périodes de tension sur le réseau (8 heures - 13 heures et 18 heures - 20 heures), a priori hors week-end et vacances scolaires. Le délestage se déroulerait vraisemblablement le matin et le soir, mais sans toucher la même zone deux fois dans la même journée (sauf cas très exceptionnel).

On estime qu’un maximum de 4 millions de clients pourraient être délestés simultanément sur un total de 39 millions, hors Corse qui est raccordée à l’Italie, et hors départements et territoires d’outre-mer. La détermination des zones ne devant être en aucun cas privées de courant est aux mains des Préfets qui ont chacun établi une liste confidentielle des sites prioritaires de leur territoire, dans une limite de 38% de puissance non délestable par département, représentant environ 80 à 100 sites par département.
Un plan de délestage communiqué à Enedis la veille des coupures

Dans le cas où MonEcowatt, site « météo » de référence du système électrique, venait à annoncer une alerte rouge, toute une communication de vigilance renforcée se mettrait en place, dont à J-3 une prise de contact d’Enedis avec les autorités organisatrices de la distribution d’énergie (AODE) et les élus. Ce ne sera que la veille que les données météo seront suffisamment précises pour pouvoir confirmer le délestage du lendemain. L’envoi du plan des coupures du Réseau de transport d'électricité (RTE) à Enedis ne se fera donc pas avant 15 heures. Avec ses directions régionales qui traduisent les blocs de 100 mégawatts à couper en tenant compte des sites prioritaires, Enedis devrait être en mesure de connaître, peu avant 17 heures, l’impact sur l’ensemble du réseau, les rues et le nombre de clients concerné par le délestage à venir.

A 17h J-1, additionnellement à une carte de France affichant les départements et les communes concernés et la profondeur du délestage, Enedis enverra aux préfets et aux maires des zones touchées, une liste département par département des rues délestées avec les horaires de coupures. Les communes pourront ainsi s’organiser en fonction de ces données. Il n’est pas encore établi si les présidents d’intercommunalités seront aussi destinataires de cette liste.
Parallèlement, sur Ecowatt, il sera possible pour toutes et tous de saisir une adresse pour savoir si elle est concernée par la coupure, et un numéro de téléphone est prévu pour les clients n’ayant pas internet. Notons qu’en cas de scénario extrême durant la nuit, RTE pourrait procéder jusqu’à 6 heures du matin le jour J, à certains rajouts de postes à délester. A ce jour, malgré de fortes demandes des élu.es, il n’est toujours pas permis aux collectivités de savoir si au moins un équipement (type gymnase) pouvant servir de lieu d’accueil temporaire durant un délestage, est non-délestable car placé sur une ligne prioritaire. La mise en place d'un service minimum d’accueil à partir de données reçues la veille à 17 heures, au plus tôt, semble particulièrement compliquée.  

La procédure territorialisée privilégiée
Si la Ministre Dominique Faure a insisté sur la dimension très territorialisée de la procédure de délestage, en soulignant la nécessité d’un travail main dans la main entre préfets et élus locaux, certaines collectivités ont fait part à France urbaine d’une circulation d’informations au local plutôt faible de la part des préfectures. Néanmoins, le 14 décembre 2022 s’est tenue une réunion organisée par la préfète Anne Clerc et le cabinet de la Première ministre, afin de rassembler tous les préfets et les inviter à organiser sous peu, si ce n’était pas déjà fait, des réunions avec les élus de leur département pour présenter les préparatifs en cours en cas de délestage et échanger.

De nombreux défis encore à clarifier
Beaucoup de questions sont encore à aborder avec la cellule de crise interministérielle pour anticiper au mieux l’organisation et les conséquences de potentiels délestages. Des défis concernant l’évaluation de l’impact sur les réseaux téléphoniques se font jour. Un large travail est mené pour que les opérateurs puissent identifier les conséquences sur les réseaux de manière rapide afin notamment de permettre aux préfectures d’obtenir une carte du 112 fiable le plus tôt possible (objectif : 19 heures à J-1) ; ce numéro d’urgence étant celui à privilégier car universellement acheminé quel que soit le réseau mobile disponible ou le fournisseur de l’appelant.

Enfin, alors que les listes de sites prioritaires ne peuvent a priori plus faire l’objet de rajouts particuliers, des interrogations se posent pour certaines installations locales clefs n’y figurant pas forcément, comme celles de production d’eau potable, d’assainissement, ou d’incinération de déchets ménagers. Ces dernières devront tenter d’anticiper au mieux, en lien avec les préfectures, les difficultés qui pourraient résulter d’un délestage. Concernant l’eau et l’assainissement, France urbaine est en attente des conclusions d’une réunion de travail ministérielle ayant eu lieu le 15 décembre dernier avec les grands opérateurs de l’eau.

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