Depuis l’éclatement de la crise sanitaire au printemps 2020, les États se sont massivement endettés pour financer les mesures de soutien à l’économie. Faut-il s’en inquiéter ? Et si la situation était moins grave qu’elle n’y paraît ? Explications avec Thomas Grjebine, économiste au Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII), qui répond aux questions d’Isabelle Bensidoun, économiste et adjointe au directeur du CEPII.
Avec la crise sanitaire, les dettes publiques se sont envolées, faut-il s’en inquiéter ?
Malgré ces très fortes augmentations, la soutenabilité des dettes nationales n’est pas remise en cause car les taux sont proches de zéro et parfois négatifs, ce qui permet d’émettre de nouvelles dettes pour rembourser les anciennes sans difficulté.
Mais les politiques mises en œuvre par les banques centrales ne permettent-elles pas de se prémunir d’une telle évolution ?
Oui, le fait que les banques centrales n’hésitent plus à contrôler les taux d’intérêt à long terme change la donne. Évidemment, officiellement, il n’est question ni de monétisation des dettes publiques - l’article 123 du traité de Lisbonne interdit à la banque centrale d’acquérir directement auprès des États les instruments de leur dette - ni d’une politique visant à réduire les spreads (les écarts de taux).
Est-ce à dire qu’un risque spécifique pèse sur les pays de la zone euro ?
La question de la dette publique se pose en des termes très différents pour les pays de la zone euro, endettés dans une monnaie qu’ils ne contrôlent pas, et des pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni ou le Japon qui sont souverains monétairement.
Les États de la zone euro sont donc contraints dans la gestion de leur dette publique faute de souveraineté monétaire, mais ils sont souverains fiscalement ! Dès lors, des hausses d’impôts sur les entreprises ou sur les plus riches ne permettraient-elles pas d’améliorer la soutenabilité de leurs dettes ?
Directement, non, car la faiblesse structurelle des taux provient en partie de l’excès d’épargne des plus riches qui achètent massivement de la dette publique. Une meilleure redistribution, par une telle hausse de la fiscalité, permettrait, en revanche, de soutenir la demande et de rendre ainsi la dette publique moins nécessaire, tout en réduisant les ratios d’endettement.
Finalement, les dettes publiques sont-elles un problème ou une solution ?
Dans un environnement où l’épargne privée est abondante, la dette publique demeure un instrument privilégié pour combler les déficits de demande.
Ce qui ne signifie pas que l’augmentation de l’endettement doit être sans limites. Mais les taux bas actuels sont une opportunité pour emprunter et financer les investissements nécessaires à la transition écologique ainsi qu’au renforcement et au verdissement de notre appareil productif.
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Avec la crise sanitaire, les dettes publiques se sont envolées, faut-il s’en inquiéter ?
Malgré ces très fortes augmentations, la soutenabilité des dettes nationales n’est pas remise en cause car les taux sont proches de zéro et parfois négatifs, ce qui permet d’émettre de nouvelles dettes pour rembourser les anciennes sans difficulté.
Mais les politiques mises en œuvre par les banques centrales ne permettent-elles pas de se prémunir d’une telle évolution ?
Oui, le fait que les banques centrales n’hésitent plus à contrôler les taux d’intérêt à long terme change la donne. Évidemment, officiellement, il n’est question ni de monétisation des dettes publiques - l’article 123 du traité de Lisbonne interdit à la banque centrale d’acquérir directement auprès des États les instruments de leur dette - ni d’une politique visant à réduire les spreads (les écarts de taux).
Est-ce à dire qu’un risque spécifique pèse sur les pays de la zone euro ?
La question de la dette publique se pose en des termes très différents pour les pays de la zone euro, endettés dans une monnaie qu’ils ne contrôlent pas, et des pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni ou le Japon qui sont souverains monétairement.
Les États de la zone euro sont donc contraints dans la gestion de leur dette publique faute de souveraineté monétaire, mais ils sont souverains fiscalement ! Dès lors, des hausses d’impôts sur les entreprises ou sur les plus riches ne permettraient-elles pas d’améliorer la soutenabilité de leurs dettes ?
Directement, non, car la faiblesse structurelle des taux provient en partie de l’excès d’épargne des plus riches qui achètent massivement de la dette publique. Une meilleure redistribution, par une telle hausse de la fiscalité, permettrait, en revanche, de soutenir la demande et de rendre ainsi la dette publique moins nécessaire, tout en réduisant les ratios d’endettement.
Finalement, les dettes publiques sont-elles un problème ou une solution ?
Dans un environnement où l’épargne privée est abondante, la dette publique demeure un instrument privilégié pour combler les déficits de demande.
Ce qui ne signifie pas que l’augmentation de l’endettement doit être sans limites. Mais les taux bas actuels sont une opportunité pour emprunter et financer les investissements nécessaires à la transition écologique ainsi qu’au renforcement et au verdissement de notre appareil productif.
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