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Actu - Le discours de Michel Barnier, bien que porteur de gestes d’apaisement et de réformes structurelles, n’a pas réussi à dissiper les inquiétudes des maires

Article ID.CiTé du 22/11/2024



Lors du 106ᵉ Congrès des maires de France, tenu le 21 novembre 2024, Michel Barnier, Premier ministre, s’est adressé à un auditoire d’élus locaux en colère face à des mesures budgétaires qu’ils jugent particulièrement contraignantes. S’il a cherché à apaiser les tensions en annonçant des initiatives de simplification administrative et en promettant davantage de marges de manœuvre, il n’a pas répondu pleinement aux revendications des élus sur la question des ponctions budgétaires, laissant de nombreuses interrogations en suspens.
Si les efforts de simplification et les promesses de dialogue sont bien accueillis, les élus attendent désormais des mesures concrètes, notamment du Sénat, pour rééquilibrer les efforts demandés aux collectivités.

Une tension budgétaire au cœur des débats
La principale source de discorde entre l’État et les collectivités locales reste le projet de loi de finances (PLF) pour 2025. Officiellement, le gouvernement évoque 5 milliards d’euros d’économies pour les collectivités, mais les élus estiment que la facture réelle s’élève à près de 11 milliards. Ces prélèvements, considérés comme insoutenables, suscitent des craintes sur les capacités d’autofinancement des collectivités et sur l’impact récessif de telles coupes.
Face à ces critiques, Michel Barnier a reconnu que le budget actuel "n’est pas parfait" et qu’il contient "des injustices". Cependant, il a tenu à dédouaner les collectivités de la responsabilité du déficit public, affirmant : « Il n’est ni normal ni juste de montrer les communes comme responsables du déficit. » Il a également rappelé certaines concessions, notamment :
- L’étalement sur quatre ans (au lieu de trois) de la hausse des cotisations à la CNRACL.
- La non-rétroactivité de la baisse de deux points du taux de remboursement du Fonds de compensation pour la TVA (FCTVA).
- Des modifications envisagées sur la mise en réserve des recettes des grandes collectivités.

Une volonté affichée de simplification administrative
Conscient de la lassitude des élus face à l’inflation normative et à la bureaucratie, Michel Barnier a placé la simplification au cœur de son discours. Parmi les mesures annoncées :
- Réduction des normes et lois "bavardes" : Promesse d’élaborer des lois plus concises et centrées sur les objectifs généraux, laissant aux collectivités locales la latitude pour interpréter et adapter les règles.
- Renforcement du rôle du CNEN (Conseil national d’évaluation des normes) : Cet organisme devra évaluer en amont les lois et leur clarté avant leur présentation au Parlement.
- Intégration des impacts sur les collectivités dans les études de loi : Afin de mesurer les conséquences des lois sur les territoires, notamment en matière de compétences exercées.
- Simplification des normes existantes : Michel Barnier a annoncé un chantier ambitieux de révision des normes dans les domaines de l’urbanisme et de l’environnement, avec un démarrage prévu dès la fin de l’année.

Focus sur le "zéro artificialisation nette" (ZAN)
Un autre point de tension réside dans l’application de l’objectif de zéro artificialisation nette des sols (ZAN), fixé pour 2050. Michel Barnier a défendu un assouplissement de ce cadre réglementaire, en proposant de :
- "Renverser la pyramide" en partant des projets de territoire, plutôt que d’imposer des règles uniformes et descendantes.
- Supprimer l’objectif intermédiaire de division par deux de l’artificialisation des sols d’ici 2031, jugé trop contraignant par les élus.
Il a toutefois précisé que cet assouplissement ne remettait pas en cause l’objectif final pour 2050. Les nouvelles dispositions devraient entrer en vigueur dès le premier semestre 2025.

Réforme du statut des élus et lutte contre le "blues des maires"
Le Premier ministre a également abordé la question des conditions d’exercice du mandat des maires, face à une vague de démissions sans précédent (2 400 depuis 2020). Une réforme du statut des élus, basée sur une proposition de loi adoptée par le Sénat, sera discutée à l’Assemblée nationale en février 2025. Parmi les axes envisagés :
- Une meilleure articulation entre mandat et vie professionnelle.
- Des formations renforcées pour les élus.
- Des dispositifs de reconversion après mandat.
Par ailleurs, Barnier a ouvert le débat sur l’extension du scrutin de liste paritaire aux communes de moins de 1 000 habitants et s’est montré favorable à une réflexion sur le cumul des mandats, une revendication portée par plusieurs élus locaux.

Sécurité : des maires au cœur des dispositifs locaux
Sur le volet sécuritaire, Michel Barnier a salué le rôle des maires comme "premiers responsables" en matière de sécurité locale. Il a confirmé le lancement de plans départementaux pour la sécurité du quotidien, à élaborer avec les préfets dès janvier 2025. Parallèlement, le "Beauvau des polices municipales" a été relancé, avec pour objectif d’élargir les prérogatives des policiers municipaux, notamment en matière de contrôle, d’identification des suspects ou d’équipement.

NDLR / Revue de presse en attente du texte officiel du discours


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