Aménagement du territoire

Aéroports de Paris, un levier stratégique pour l’État ?

Article ID.CiTé du 28/08/2019



Au moment où la controverse s’amplifie contre le projet du gouvernement de privatiser Aéroports de Paris (ADP), Nathalie Roseau met en perspective l’histoire de cet équipement structurant et interroge le bien-fondé d’une telle réforme.

Le 11 avril 2019, l’Assemblée nationale approuvait la loi PACTE (Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises), ouvrant la voie à une privatisation complète du groupe Aéroports de Paris (ADP), dont l’État est aujourd’hui l’actionnaire majoritaire. Ce projet a suscité une vive controverse : près de 250 parlementaires opposés à cette perspective ont transmis au Conseil constitutionnel une requête pour un Référendum d’initiative partagée (RIP) qui a été validée le 9 mai. En parallèle, des recours ont été déposés par des groupes de députés et de sénateurs issus de diverses formations politiques. Plus largement, nombreux sont ceux qui s’expriment dans les médias, à travers des pétitions ou dans la rue, contre la privatisation.

Les objections sont de diverses natures, principalement économique et souverainiste : l’État doit-il se défaire d’un actif dont le fonctionnement et la rentabilité semblent performants ? Doit-il céder au secteur privé la maîtrise du transport aérien international sur son territoire ? Au-delà de ces interrogations, le débat masque une difficulté, voire une incapacité à penser le rôle des Aéroports de Paris comme outil stratégique de l’action de l’État. Cet enjeu ne peut être sous-estimé car il concerne plus largement les politiques publiques.

"L’Aéroport de Paris", nom originel de l’établissement public autonome créé par ordonnance ministérielle du 24 octobre 1945 (qui se décline au pluriel en 1989), est en effet un grand équipement international, national, métropolitain (voir encadré). Institué dans l’immédiat après-guerre, au moment de la formation de l’État providence, planificateur et aménageur, il constitue un bien commun, au sens d’un patrimoine partagé qui s’est sédimenté par couches successives de significations et de fonctionnalités.

Cette résultante complexe explique la forte contestation autour de la perspective de sa privatisation et la difficulté de lui donner un sens. Trois enjeux liés à la mondialisation, au territoire du Grand Paris et au climat nous semblent essentiels pour comprendre l’importance des Aéroports de Paris pour la France et pour l’État.

Au sommaire
- ADP : un équipement international, national et métropolitain
- La formation d’une porte d’entrée sur le monde
- Le financement d’un équipement national
- Une infrastructure à large empreinte territoriale
- De la prédation des ressources à l’action sur le climat ?
- Un instrument pour gouverner le futur

Métropolitiques - Analyse complète - 2019-08-27