La trajectoire financière 2017-2020 présente de nombreux biais de construction qui affectent sa sincérité et elle ne paraît pas pouvoir être respectée. En 2017, sans mesures fortes de redressement, le déficit public dépasserait l’objectif de 0,4 point de PIB, pour atteindre 3,2 points de PIB ; en 2018 et au-delà, un effort d’économies sans précédent serait nécessaire pour respecter la trajectoire du Programme de stabilité.
La Cour recommande de revoir les méthodes de programmation et de pilotage des finances publiques. Elle identifie en outre les leviers d’action pouvant être mobilisés pour maîtriser durablement l’évolution de nos dépenses publiques.
- Des mesures générales concernant l’ensemble des administrations publiques
Plusieurs leviers sont utilisables afin de maîtriser la masse salariale des administrations publiques (284 Md€ en 2016). Le gel de la valeur du point peut ainsi freiner la masse salariale, mais son maintien au-delà d’une certaine durée peut créer des distorsions à l’égard du secteur privé et provoquer des dépenses supplémentaires du fait de la garantie individuelle de pouvoir d’achat (GIPA) et du minimum de traitement.
Des aménagements peuvent toutefois limiter le coût d’une revalorisation du point : lui substituer une attribution uniforme de points ; ne l’appliquer qu’au traitement indiciaire et non aux primes ; découpler les valeurs du point des trois fonctions publiques et les faire évoluer en fonction des contextes spécifiques à chacune.
D’autres leviers portant sur la masse salariale pourraient être utilisés : le réexamen de certaines indemnités dont la justification n’apparaît plus évidente ; un rééchelonnement du déroulement des carrières, qui pourrait être négocié en contrepartie des majorations de traitement accordées dans le cadre du protocole PPCR ; une reprise de la réduction du nombre de fonctionnaires ; une augmentation de la durée effective de travail dans la fonction publique, qui est actuellement inférieure à celle du secteur privé.
- La modernisation de la gestion des administrations constitue un autre levier d’action pour renforcer l’efficience des dépenses publiques.
Elle peut notamment passer par un renforcement des actions de simplification administrative, afin d’alléger le poids des normes sur les entreprises comme sur les collectivités locales.
Elle peut également reposer sur une accélération du développement de l’administration numérique, la poursuite de l’effort de resserrement des réseaux territoriaux de l’administration, la dynamisation de la gestion de l’immobilier de l’État et la prolongation de la démarche de rationalisation des achats.
- Des marges d’efficience sont également à rechercher du côté des dépenses fiscales, dont la Cour critique de manière récurrente l’absence de ciblage et d’évaluation, alors que leur coût total s’est élevé à près de 86 Md€ en 2016 (73 Md€ hors CICE). Les évaluations apparaissent d’autant plus nécessaires que certaines dépenses fiscales ont des effets contraires à ceux attendus ou peinent à atteindre leurs objectifs.
- De même, alors que les investissements des administrations publiques se sont élevés à 99 Md€, la Cour a pu souligner à l’occasion de différents contrôles que l’évaluation préalable de leur pertinence économique restait insuffisante. Un renforcement du rôle du Commissariat général à l’investissement (CGI), une publication systématique de ses avis et une attention plus grande portée par le Gouvernement à leur teneur permettrait de renforcer la pertinence des choix d’investissement.
- Enfin, la maîtrise de la dépense locale est un levier majeur d’efficience : elle passe par une clarification des missions des différents échelons de collectivités pour éviter les doublons et réduire la complexité administrative, et par la poursuite de l’encadrement des concours financiers aux collectivités territoriales.
- De grandes politiques publiques à rendre efficiente. Parmi les points évoqués, plusieurs voies pourraient être explorées pour renforcer l’efficience de la politique du logement. La Cour a recommandé deux pistes principales d’évolution en matière de logement social : s’adresser prioritairement aux publics modestes et défavorisés en diminuant les plafonds de ressources en zone tendue ; réorienter les politiques publiques vers une gestion plus active du parc existant.
Pour ce qui concerne les aides au logement, une réflexion devrait être engagée afin de prendre en compte le taux d’effort réel des locataires selon qu’ils bénéficient d’un logement HLM ou qu’ils occupent un logement privé. Enfin, il conviendrait de réexaminer les aides fiscales aux logements privés (taux réduits de TVA, avantages fiscaux en faveur de l’immobilier locatif) dont l’efficacité est incertaine et qui s’accompagnent d’importants effets d’aubaine.
Des marges d’efficience existent s’agissant de la politique de l’emploi, de la formation professionnelle et de l’assurance chômage. En matière de contrats aidés, dont les résultats en termes d’insertion professionnelle sont faibles, la Cour a formulé plusieurs pistes de réorientation, notamment un meilleur ciblage sur les jeunes pas ou peu qualifiés, une concentration des contrats aidés dans le secteur marchand, une réduction de leur durée maximale et leur inscription dans un parcours vers l’emploi complété par une formation pré-qualifiante ou qualifiante qui prendrait la forme de contrats d’apprentissage ou de professionnalisation.
En ce qui concerne l’assurance chômage, la Cour avait identifié en 2015 différentes pistes susceptibles d’être explorées, en particulier le réexamen de plusieurs paramètres qui concourent au coût de l’indemnisation du chômage : le taux de remplacement, la durée minimale d’affiliation, la durée d’indemnisation, son montant maximum, son taux de service (durée d’indemnisation rapportée à la durée d’affiliation), le périmètre des employeurs publics affiliés, le plafonnement de l’assiette de contribution, le taux de contribution ou encore la modulation des contributions.
Enfin, la multiplicité des acteurs en matière de formation professionnelle pose d’importants problèmes de coordination. L’évaluation prévue en 2017 du plan "500 000 formations" devrait permettre une appréciation qualitative de ses résultats, dont il faudra tirer les enseignements en vue d’apporter une réponse structurelle et coordonnée à la question de la formation des demandeurs d’emploi.
COUR DES COMPTES - Rapport - 2017-06-29
COUR DES COMPTES - Synthèse - 2017-06-29
La Cour recommande de revoir les méthodes de programmation et de pilotage des finances publiques. Elle identifie en outre les leviers d’action pouvant être mobilisés pour maîtriser durablement l’évolution de nos dépenses publiques.
- Des mesures générales concernant l’ensemble des administrations publiques
Plusieurs leviers sont utilisables afin de maîtriser la masse salariale des administrations publiques (284 Md€ en 2016). Le gel de la valeur du point peut ainsi freiner la masse salariale, mais son maintien au-delà d’une certaine durée peut créer des distorsions à l’égard du secteur privé et provoquer des dépenses supplémentaires du fait de la garantie individuelle de pouvoir d’achat (GIPA) et du minimum de traitement.
Des aménagements peuvent toutefois limiter le coût d’une revalorisation du point : lui substituer une attribution uniforme de points ; ne l’appliquer qu’au traitement indiciaire et non aux primes ; découpler les valeurs du point des trois fonctions publiques et les faire évoluer en fonction des contextes spécifiques à chacune.
D’autres leviers portant sur la masse salariale pourraient être utilisés : le réexamen de certaines indemnités dont la justification n’apparaît plus évidente ; un rééchelonnement du déroulement des carrières, qui pourrait être négocié en contrepartie des majorations de traitement accordées dans le cadre du protocole PPCR ; une reprise de la réduction du nombre de fonctionnaires ; une augmentation de la durée effective de travail dans la fonction publique, qui est actuellement inférieure à celle du secteur privé.
- La modernisation de la gestion des administrations constitue un autre levier d’action pour renforcer l’efficience des dépenses publiques.
Elle peut notamment passer par un renforcement des actions de simplification administrative, afin d’alléger le poids des normes sur les entreprises comme sur les collectivités locales.
Elle peut également reposer sur une accélération du développement de l’administration numérique, la poursuite de l’effort de resserrement des réseaux territoriaux de l’administration, la dynamisation de la gestion de l’immobilier de l’État et la prolongation de la démarche de rationalisation des achats.
- Des marges d’efficience sont également à rechercher du côté des dépenses fiscales, dont la Cour critique de manière récurrente l’absence de ciblage et d’évaluation, alors que leur coût total s’est élevé à près de 86 Md€ en 2016 (73 Md€ hors CICE). Les évaluations apparaissent d’autant plus nécessaires que certaines dépenses fiscales ont des effets contraires à ceux attendus ou peinent à atteindre leurs objectifs.
- De même, alors que les investissements des administrations publiques se sont élevés à 99 Md€, la Cour a pu souligner à l’occasion de différents contrôles que l’évaluation préalable de leur pertinence économique restait insuffisante. Un renforcement du rôle du Commissariat général à l’investissement (CGI), une publication systématique de ses avis et une attention plus grande portée par le Gouvernement à leur teneur permettrait de renforcer la pertinence des choix d’investissement.
- Enfin, la maîtrise de la dépense locale est un levier majeur d’efficience : elle passe par une clarification des missions des différents échelons de collectivités pour éviter les doublons et réduire la complexité administrative, et par la poursuite de l’encadrement des concours financiers aux collectivités territoriales.
- De grandes politiques publiques à rendre efficiente. Parmi les points évoqués, plusieurs voies pourraient être explorées pour renforcer l’efficience de la politique du logement. La Cour a recommandé deux pistes principales d’évolution en matière de logement social : s’adresser prioritairement aux publics modestes et défavorisés en diminuant les plafonds de ressources en zone tendue ; réorienter les politiques publiques vers une gestion plus active du parc existant.
Pour ce qui concerne les aides au logement, une réflexion devrait être engagée afin de prendre en compte le taux d’effort réel des locataires selon qu’ils bénéficient d’un logement HLM ou qu’ils occupent un logement privé. Enfin, il conviendrait de réexaminer les aides fiscales aux logements privés (taux réduits de TVA, avantages fiscaux en faveur de l’immobilier locatif) dont l’efficacité est incertaine et qui s’accompagnent d’importants effets d’aubaine.
Des marges d’efficience existent s’agissant de la politique de l’emploi, de la formation professionnelle et de l’assurance chômage. En matière de contrats aidés, dont les résultats en termes d’insertion professionnelle sont faibles, la Cour a formulé plusieurs pistes de réorientation, notamment un meilleur ciblage sur les jeunes pas ou peu qualifiés, une concentration des contrats aidés dans le secteur marchand, une réduction de leur durée maximale et leur inscription dans un parcours vers l’emploi complété par une formation pré-qualifiante ou qualifiante qui prendrait la forme de contrats d’apprentissage ou de professionnalisation.
En ce qui concerne l’assurance chômage, la Cour avait identifié en 2015 différentes pistes susceptibles d’être explorées, en particulier le réexamen de plusieurs paramètres qui concourent au coût de l’indemnisation du chômage : le taux de remplacement, la durée minimale d’affiliation, la durée d’indemnisation, son montant maximum, son taux de service (durée d’indemnisation rapportée à la durée d’affiliation), le périmètre des employeurs publics affiliés, le plafonnement de l’assiette de contribution, le taux de contribution ou encore la modulation des contributions.
Enfin, la multiplicité des acteurs en matière de formation professionnelle pose d’importants problèmes de coordination. L’évaluation prévue en 2017 du plan "500 000 formations" devrait permettre une appréciation qualitative de ses résultats, dont il faudra tirer les enseignements en vue d’apporter une réponse structurelle et coordonnée à la question de la formation des demandeurs d’emploi.
COUR DES COMPTES - Rapport - 2017-06-29
COUR DES COMPTES - Synthèse - 2017-06-29
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