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Environnement - Risques - Catastrophes naturelles

Expérimentation territoriale d'un droit de dérogation reconnu aux préfet - Le Conseil d'Etat rejette la demande d'annulation du décret du 29 décembre 2017

(Article ID.CiTé/ID.Veille du 26/06/2019 )



Expérimentation territoriale d'un droit de dérogation reconnu aux préfet - Le Conseil d'Etat rejette la demande d'annulation du décret du 29 décembre 2017
Aux termes de l'article 1er du décret du 29 décembre 2017, certains préfets et représentants de l'Etat précisément identifiés (1) peuvent " à titre expérimental et pendant une durée de deux ans à compter de (sa) publication (...) déroger à des normes arrêtées par l'administration de l'Etat dans les conditions fixées par les articles 2 à 4 ". 

Son article 2 précise que " le préfet peut faire usage de cette faculté (...) pour prendre des décisions non réglementaires relevant de sa compétence " dans les matières suivantes : " 1° Subventions, concours financiers et dispositifs de soutien en faveur des acteurs économiques, des associations et des collectivités territoriales ; 2° Aménagement du territoire et politique de la ville ; 3° Environnement, agriculture et forêts ; 4° Construction, logement et urbanisme ; 5° Emploi et activité économique ; 6° Protection et mise en valeur du patrimoine culturel ; 7° Activités sportives, socio-éducatives et associatives. "

Par ailleurs, son article 3 soumet cette faculté à quatre conditions cumulatives de sorte qu'une dérogation ne peut légalement intervenir que lorsqu'elle est " 1° (...) justifiée par un motif d'intérêt général et l'existence de circonstances locales ", qu'elle a " 2° (...) pour effet d'alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l'accès aux aides publiques ", qu'elle est " 3° (...) compatible avec les engagements européens et internationaux de la France ", et qu'elle ne porte pas " 4° (...) atteinte aux intérêts de la défense ou à la sécurité des personnes et des biens, ni une atteinte disproportionnée aux objectifs poursuivis par les dispositions auxquelles il est dérogé ". 

Enfin, en vertu de son article 4, la décision de dérogation prend la forme d'un arrêté motivé et publié au recueil des actes administratifs.

Le décret attaqué autorise les préfets concernés à déroger de façon ponctuelle, pour la prise d'une décision non réglementaire relevant de leur compétence, aux normes réglementaires applicables dans certaines matières limitativement énumérées. 
Ces dérogations ne peuvent être accordées que dans le respect des normes supérieures applicables. Si, ainsi que le souligne la requérante, le décret attaqué ne désigne pas précisément les normes réglementaires auxquelles il permet de déroger, il limite ces dérogations, d'une part, aux règles qui régissent l'octroi des aides publiques afin d'en faciliter l'accès, d'autre part, aux seules règles de forme et de procédure applicables dans les matières énumérées afin d'alléger les démarches administratives et d'accélérer les procédures. Enfin, il ne permet une dérogation que sous conditions qu'elle réponde à un motif d'intérêt général, qu'elle soit justifiée par les circonstances locales, qu'elle ne porte pas atteinte aux intérêts de la défense ou à la sécurité des personnes et des biens et qu'elle ne porte pas une atteinte disproportionnée aux objectifs poursuivis par les dispositions auxquelles il est dérogé.

Il résulte de ce qui précède que le décret contesté, dont le champ et la durée d'application sont limités, n'autorise, dans le respect des normes supérieures, que des dérogations dont l'objet est limité et dont les conditions de mise en oeuvre sont définies de façon précise. Par suite, il ne méconnaît ni les dispositions de l'article 37-1 de la Constitution, ni la loi.

En troisième lieu, le II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement dans sa rédaction issue de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, énonce au nombre des principes qui, " dans le cadre des lois qui en définissent la portée ", inspire les politiques de l'environnement et notamment la gestion des ressources : " 9° Le principe de non-régression, selon lequel la protection de l'environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement, ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment. (...) ". Si l'association requérante soutient que les dispositions du décret attaqué méconnaissent ce principe, il résulte des ses termes mêmes et notamment de son article 1er qu'il ne permet pas de déroger à des normes réglementaires ayant pour objet de garantir le respect de principes consacrés par la loi tel que le principe de non-régression. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ce principe doit être écarté.

Il résulte de tout ce qui précède que l'association requérante n'est pas fondée à demander l'annulation du décret attaqué. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être également rejetées.
Conseil d'État N° 421871 - 2019-06-17

(1)  Préfets des régions Pays de la Loire et Bourgogne-Franche-Comté, aux préfets des départements de ces régions et des départements du Lot, du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Creuse ainsi qu'au préfet de Mayotte et au représentant de l'Etat à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin et, par délégation, au préfet délégué dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin











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