Environnement - Risques - Catastrophes naturelles

Juris - Annulation d’un projet éolien susceptible d'affecter la faune locale protégée tout en ne « répondant pas à une raison impérative d’intérêt public majeur »

Article ID.CiTé du 15/03/2022



Un projet d'aménagement ou de construction d'une personne publique ou privée susceptible d'affecter la conservation d'espèces animales ou végétales protégées et de leurs habitats ne peut être autorisé, à titre dérogatoire, que s'il répond, par sa nature et compte tenu des intérêts économique et sociaux en jeu, à une raison impérative d'intérêt public majeur.

En présence d'un tel intérêt, le projet ne peut cependant être autorisé, eu égard aux atteintes portées aux espèces protégées appréciées en tenant compte des mesures de réduction et de compensation prévues, que si, d'une part, il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et, d'autre part, cette dérogation ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.

En l’espèce, le parc éolien projeté, d'une part, serait susceptible d'affecter quatre espèces de reptiles, une espèce d'amphibien, soixante-dix espèces d'oiseaux dont neuf à fort enjeux de conservation et, d'autre part, représenterait une production électrique évaluée à trente mégawattheures, correspondant à la consommation d'environ 26 000 habitants, permettrait d'éviter le rejet annuel dans l'atmosphère de l'ordre de 50 920 tonnes de gaz carbonique. Après avoir relevé que le projet de parc éolien n'apporterait qu'une contribution modeste à la politique énergétique nationale de développement de la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d'énergie dans une zone qui compte déjà de nombreux parcs éoliens et que les bénéfices socio-économiques du projet seraient limités et principalement transitoires, la cour a exactement qualifié les faits de l'espèce en jugeant que, dans ces conditions, le projet en cause ne répondait pas à une raison impérative d'intérêt public majeur au sens du c) du 4° de l'article L. 411-2 du même code.

En statuant ainsi, par un arrêt suffisamment motivé, la cour n'a pas apprécié l'existence d'une raison impérative d'intérêt public majeur en fonction de l'ampleur de l'atteinte porté par le projet à des espèces protégées mais s'est bornée à relever l'existence d'une telle atteinte, pour en déduire la nécessité d'une autorisation de l'article L. 411-2. Ce faisant, elle n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit. Elle n'a pas davantage commis d'erreur de droit en ne recherchant pas si les autres conditions posées par l'article L. 411-2 étaient remplies, dès lors qu'elle jugeait que le projet ne répondait pas à une raison impérative d'intérêt public majeur.


Conseil d'État N° 439784 - 2022-03-10