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Juris - Hébergement d'urgence - L’Etat est condamné à rembourser au département du Puy-de-Dôme la somme de 1 272 464 euros, assortie des intérêts au taux légal

Article ID.CiTé du 09/01/2023



Si les ressortissants étrangers qui font l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) ou dont la demande d'asile a été définitivement rejetée et qui doivent ainsi quitter le territoire n'ont, en principe, pas vocation à bénéficier du dispositif d'hébergement d'urgence, ils relèvent néanmoins du champ d'application de l'article L. 345-2-2 du CASF.

Par suite, la situation de ces ressortissants ne fait pas obstacle à ce qu'une carence avérée et prolongée de l'Etat dans la mise en oeuvre de sa compétence en matière d'hébergement d'urgence soit caractérisée en l'absence même de circonstances exceptionnelles, qu'il revient seulement au juge des référés de prendre en considération, lorsqu'il est saisi, en application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative (CJA), pour déterminer si cette carence caractérise en outre une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale au sens de cet article.

Préjudice subi par le département :
Il résulte ainsi des dispositions des articles L. 222-2 et L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles que, sur leur fondement, les départements peuvent être amenés à prendre temporairement en charge l'hébergement de familles en difficulté, le cas échéant au titre des mesures d'" aide à domicile " prévues par ces dispositions. Si les départements doivent procéder à un examen de la situation particulière des familles qui sollicitent une telle aide et s'assurer, avant d'en refuser l'octroi ou d'interrompre son versement, de l'existence d'une solution alternative de nature à éviter que la santé ou la sécurité des enfants soient menacées, cette intervention conserve un caractère supplétif et n'impose pas aux départements de prendre définitivement à leur charge des dépenses qui incombent à l'Etat.

La cour a jugé qu'il n'était pas sérieusement contesté par l'Etat que l'ensemble des familles concernées remplissaient en l'espèce les critères fixés à l'article L. 345-1 du code de l'action sociale et des familles, tenant à de graves difficultés notamment économiques, familiales, de logement, de santé ou d'insertion. Ce faisant, elle a nécessairement estimé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, qu'aucune des familles prises en charge, dont le département détaillait dans un tableau la situation économique, sociale et sanitaire, ne se trouvait dans une situation relevant de la compétence propre du département au titre de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles.

Par suite, elle n'a pas insuffisamment motivé son arrêt en déterminant le préjudice subi par le département du fait de sa prise en charge de l'ensemble de ces familles sans détailler elle-même le coût de la prise en charge de chacune d'entre elles ni préciser, pour chacune, qu'elle ne relevait pas de la compétence principale du département au titre de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles. C'est par une appréciation souveraine, exempte de dénaturation, qu'elle a estimé que les justificatifs retraçant sous forme de tableaux la situation, les périodes et le coût de prise en charge de chacune de ces familles suffisaient à établir la réalité du préjudice comme son quantum, qu'elle a souverainement fixé à la somme de 1 272 464 euros.


Conseil d'État N° 458724 - 2022-12-22