Environnement - Risques - Catastrophes naturelles

Juris - Le Conseil constitutionnel admet que les agents contractuels de l’ONF peuvent constater certaines infractions et prendre des mesures de police

Article ID.CiTé du 04/04/2023



Le syndicat requérant reproche aux dispositions renvoyées de l’article L. 222-6 du code forestier de permettre à l’Office national des forêts d’employer des agents contractuels de droit privé en vue notamment de l’accomplissement de ses missions de police administrative.
Ce faisant, elles auraient pour effet de déléguer à des personnes privées des compétences de police administrative, en méconnaissance de l’article 12 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Les différentes catégories de personnel employées par l’Office national des forêts.
22.
 L’article L. 222-6 du code forestier énumère les différentes catégories de personnel employées par l’Office national des forêts. À ce titre, les dispositions contestées de cet article prévoient que peuvent être recrutés des agents contractuels de droit privé, régis par le code du travail, pour la réalisation de l’ensemble de ses missions, y compris de police administrative.
23. Il résulte de l’article L. 221-1 du même code que l’Office national des forêts, établissement public national placé sous la tutelle de l’État, est une personne morale de droit public. En prévoyant que cet établissement public peut employer des agents contractuels de droit privé accomplissant pour son compte des missions de police administrative, les dispositions contestées n’ont ni pour objet ni pour effet de déléguer à des personnes privées des compétences de police administrative générale.
24. Le grief tiré de la méconnaissance des exigences résultant de l’article 12 de la Déclaration de 1789 ne peut donc qu’être écarté.
25. Par conséquent, le 2 ° de l’article L. 222-6 du code forestier, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclaré conforme à la Constitution.

Pouvoirs confiés aux agents contractuels de droit privé de l’Office national des forêts en matière d’infractions forestières :

27. L’article L. 161-4 du code forestier habilite certaines catégories d’agents à rechercher et constater les infractions forestières. Les dispositions contestées du premier alinéa de son paragraphe II donnent compétence aux agents contractuels de droit privé de l’Office national des forêts pour constater ces infractions.
28. En application des dispositions contestées de l’article L. 161-7 du même code, ces agents peuvent procéder au constat des infractions forestières dans tous les bois et forêts, quel que soit leur régime de propriété. Les dispositions contestées de l’article L. 174-9 du même code rendent ces dispositions applicables à La Réunion.
29. En vertu des dispositions contestées de l’article L. 161-12 du même code, les agents contractuels de droit privé de l’Office national des forêts transmettent les procès-verbaux d’infractions qu’ils établissent au représentant du ministère public.
30. Les dispositions contestées de l’article L. 363-4 du même code prévoient que, lorsque ces agents constatent par procès-verbal un défrichement réalisé en infraction aux dispositions du livre III du code forestier, ils peuvent ordonner l’interruption des travaux et la consignation des matériaux et du matériel de chantier.
31. D’une part, il résulte des termes mêmes des dispositions contestées que les agents contractuels de droit privé de l’Office national des forêts sont uniquement habilités à constater, sans les rechercher, les délits et contraventions prévus par le code forestier et, dans le cas où ils constatent un défrichement illicite, à ordonner des mesures conservatoires.
32. D’autre part, les agents contractuels de droit privé, qui doivent être commissionnés et assermentés pour procéder à ces constatations, sont tenus de transmettre, dans les cinq jours, l’original des procès-verbaux qu’ils dressent au procureur de la République ou au directeur régional de l’administration chargée des forêts, selon que l’infraction est constitutive d’un délit ou d’une contravention, et simultanément la copie de ces procès-verbaux à l’autorité qui n’est pas destinataire de l’original. Lorsqu’ils constatent un défrichement illicite pour lequel ils ordonnent une mesure conservatoire, la copie du procès-verbal est transmise sans délai au ministère public.
33. Dès lors, compte tenu des prérogatives ainsi confiées à ces agents et de leurs modalités d’exercice, les dispositions contestées ne méconnaissent pas l’exigence de direction et de contrôle de l’autorité judiciaire sur la police judiciaire résultant de l’article 66 de la Constitution.

Pouvoirs confiés aux agents contractuels de droit privé de l’Office national des forêts en matière d’infractions au code de l’environnement et au code de la santé publique :

34. En application des dispositions contestées de l’article L. 1324-1 du code de la santé publique, les agents contractuels de droit privé de l’Office national des forêts sont compétents pour constater les infractions prévues au titre de la police des eaux potables et des eaux minérales naturelles.
35. Les dispositions contestées des articles L. 216-3, L. 231-5, L. 341-20, L. 362-5, L. 415-1, L. 428-20, L. 437-1 et L. 541-44 du code de l’environnement donnent compétence aux agents contractuels de droit privé de l’Office national des forêts pour constater les infractions prévues au titre des polices spéciales de l’eau, des milieux physiques, des sites naturels inscrits et classés, d’accès aux espaces naturels, de protection du patrimoine naturel, de la chasse, de la pêche en eau douce et de traitement des déchets. À cette fin, les dispositions contestées du second alinéa du paragraphe II de l’article L. 161-4 du code forestier prévoient que ces agents peuvent retenir l’auteur de l’infraction en cas de refus ou d’impossibilité de justifier de son identité, recueillir les déclarations de toute personne, requérir directement la force publique, procéder à la saisie des objets ayant notamment servi à la commission de l’infraction ou qui en sont le produit, procéder ou faire procéder à la destruction des végétaux et des animaux morts ou non viables ou au placement des animaux et végétaux viables saisis, prélever ou faire prélever des échantillons placés sous scellés en vue d’analyse ou d’essai, ou encore procéder à des communications d’informations et documents détenus ou recueillis dans l’exercice de leurs mission.
36. En premier lieu, il résulte des termes mêmes des dispositions contestées que les agents contractuels de droit privé de l’Office national des forêts sont uniquement habilités à constater, sans les rechercher, certaines infractions prévues par le code de l’environnement et le code de la santé publique.
37. En second lieu, d’une part, il résulte des articles L. 172-16 du code de l’environnement et L. 1324-2 du code de la santé publique que ces agents, qui doivent être commissionnés et assermentés pour procéder à ces constatations, sont tenus de transmettre au procureur de la République les procès-verbaux qu’ils dressent dans les cinq jours qui suivent leur clôture.
38. D’autre part, si, lorsqu’ils sont investis par le code de l’environnement d’une mission de constatation de certaines infractions, ces agents disposent des pouvoirs particuliers prévus au paragraphe II de l’article L. 161-4 du code forestier, ils ne peuvent les exercer que pour les besoins de cette mission et sous le contrôle, selon les cas, d’un officier de police judiciaire ou du procureur de la République. En particulier, ils ne peuvent retenir l’auteur d’une infraction que pendant le temps nécessaire à l’information et à la décision de l’officier de police judiciaire et doivent obtenir l’autorisation du procureur de la République pour pouvoir procéder au placement des animaux et végétaux viables saisis.
39. Dès lors, compte tenu des prérogatives ainsi confiées à ces agents et de leurs modalités d’exercice, ces dispositions ne méconnaissent pas l’article 66 de la Constitution.

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Décision n° 2023-1042 QPC  du 31 mars 2023