Sécurité locale - Police municipale

Juris - Le maire n'était pas compétent pour prendre un arrêté interdisant sur le territoire de sa commune tout spectacle de cirque présentant des animaux vivants d'espèces non domestiques

Article ID.CiTé du 30/05/2023



La police spéciale des établissements de spectacles itinérants relève du préfet. S'il appartient au maire, responsable de l'ordre public sur le territoire de sa commune, de prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, les interdictions édictées à ce titre doivent être strictement proportionnées à leur nécessité.

En l'espèce, l'arrêté municipal du 6 avril 2016 constitue une mesure de police générale, prise sur le fondement des articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. Il ressort des termes mêmes de cet arrêté que le maire de la commune a entendu interdire sur le territoire de sa commune tout spectacle de cirque présentant des animaux vivants d'espèces non domestiques, motif pris des conditions de détention imposées à ces animaux qui seraient contraire à leurs besoins biologiques, et de la nécessité de garantir la moralité publique en évitant toute atteinte aux valeurs de respect de la nature et de l'environnement.  Cet arrêté est également motivé par le souhait de promouvoir les cirques sans animaux et la pédagogie auprès des habitants de la ville, en particulier les jeunes, sur les conditions de vie des animaux dans les cirques.

Pour justifier du bien-fondé de cet arrêté, la commune invoque un risque de troubles, d'une part à la morale publique, en raison de l'indignité de la condition dans laquelle les animaux sont maintenus et du spectacle qui en résulte, notamment auprès d'un jeune public, et d'autre part à la sécurité publique, en raison du contexte local de forte opposition à de tels spectacles.

En premier lieu, la commune ne peut utilement soutenir qu'il existerait pour les animaux d'espèces non domestiques un principe équivalent à celui du respect de la dignité humaine justifiant que le maire puisse interdire de manière générale pour ce motif au nom de son pouvoir de police générale les spectacles présentant ces animaux, alors que de tels spectacles sont autorisés par la loi et que la protection du bien-être de ces animaux est par ailleurs strictement réglementée et contrôlée par les services de l'Etat, ainsi qu'il a été dit au point 2.

En second lieu, pour attester du risque de troubles à la sécurité publique sur son territoire, la commune se borne à produire divers documents, dont la plupart sont postérieurs à son arrêté (…)

Dans ces conditions, eu égard à l'existence d'une police spéciale de réglementation et de contrôle des conditions de détention et d'utilisation des animaux vivants d'espèces non domestiques dans les établissements de spectacles itinérants confiée à l'Etat, et en l'absence de risque de troubles graves et imminents à l'ordre public et de circonstances locales particulières, le maire n'était pas compétent pour prendre un arrêté interdisant sur le territoire de sa commune tout spectacle de cirque présentant des animaux vivants d'espèces non domestiques.


CAA de VERSAILLES N° 20VE03238 - 2023-03-21