Action sociale

Juris. / "Lieux de vie et d'accueil" - L'application immédiate du décret introduisant un régime nouveau de tarification a porté une atteinte excessive à leurs intérêts (CE/B)

Article ID.CiTé du 09/03/2015



Le III de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles (CASF) habilite le pouvoir réglementaire à fixer les règles de financement et de tarification des lieux de vie et d'accueil. La tarification des lieux de vie et d'accueil vise à assurer le financement notamment par l'Etat et les départements des prestations fournies par ces lieux de vie. 
Eu égard à l'objet de la tarification, le pouvoir réglementaire est compétent pour prévoir les conditions dans lesquelles les sommes procurées par la tarification qui n'auraient pas été utilisées pour la fourniture des prestations en vue desquelles elles avaient été allouées ou dont l'emploi ne serait pas justifié doivent être totalement ou partiellement reversées aux organismes financeurs…
En revanche, le pouvoir réglementaire a excédé l'habilitation dont il dispose en imposant, au 3° du IV de l'article D. 316-6 du CASF, un reversement des sommes qui correspondent à des dépenses admises lors de la fixation du forfait et qui ont été effectivement utilisées à cette fin, alors même que, aux termes de ces dispositions, il s'agirait de " dépenses dont le niveau paraît excessif, au regard de l'activité et des coûts des lieux de vie fournissant des prestations comparables ". 
Le décret n° 2013-11 du 4 janvier 2013 a pour objet de redéfinir les modalités de financement et la procédure de tarification applicables aux lieux de vie et d'accueil. Les lieux de vie et d'accueil, dont le financement était jusqu'ici assuré par convention bilatérale établie avec chaque organisme financeur, sont désormais financés par un forfait journalier fixé uniformément par l'autorité compétente pour en autoriser la création, en fonction des frais de fonctionnement de ces structures. L'entrée en vigueur immédiate du décret attaqué a ainsi eu pour effet de soumettre les lieux de vie et d'accueil à un régime nouveau de tarification sans prévoir le délai indispensable à l'élaboration de la proposition de forfait journalier qu'ils doivent soumettre aux autorités compétentes et à la fixation du forfait par ces autorité. 
Elle était ainsi susceptible d'entraîner une rupture dans le financement de certains de ces lieux, qui constituent de petites structures aux ressources limitées, et de faire obstacle à l'accueil de nouvelles personnes. Ce faisant, l'application immédiate du décret attaqué a porté une atteinte excessive aux intérêts des lieux de vie et d'accueil en cause et à ceux des personnes susceptibles d'être accueillies. Par suite, l'absence de dispositions transitoires entache ce décret d'illégalité.
Conseil d'État N° 366440 366563 366583 - 2014-12-23