Le maintien dérogatoire de primes et indemnités versées aux agents d’une collectivité territoriale avant le 28 janvier 1984 est conditionné, d’une part, à l’inscription des montants correspondants dans le budget de la collectivité et, d’autre part, à l’existence d’une délibération de l’assemblée de la collectivité, antérieure au 28 janvier 1984, fixant les conditions d’attribution et le taux moyen de ces primes et indemnités.
Avantage injustifié accordé à autrui par un gestionnaire public en méconnaissance de ses obligations
Dans l’arrêt attaqué, la Cour des comptes a relevé qu’en méconnaissance des dispositions mentionnées aux points 7 et 8 du présent arrêt, l’ordre de réquisition du 22 novembre 2022 n’était pas accompagné de la pièce justificative nécessaire et que si l’ordre de réquisition du 23 novembre 2023 était appuyé d’une délibération du 24 septembre 1997 prévoyant l’inscription directement dans le budget de la commune d’une prime de fin d’année précédemment versée par une association du personnel communal, cette délibération, en tout état de cause postérieure au 28 janvier 1984, ne prévoyait pas les conditions d’attribution et le taux moyen de cette prime.
Si cette délibération a été complétée, à la demande du comptable public de l’époque, d’une mention au procès-verbal du conseil municipal du 3 décembre 1997 précisant les conditions de versement et de liquidation de cette prime, les premiers juges ont considéré que cette mention, au demeurant également postérieure au 28 janvier 1984, ne pouvait satisfaire aux exigences posées par l'annexe I précitée de l'article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales, faute de revêtir le caractère d’une décision exécutoire de l’assemblée délibérante.
La Cour des comptes a relevé, dans ces conditions, qu’en refusant à deux reprises de se mettre en conformité avec les dispositions mentionnées ci-dessus et en préférant requérir la comptable publique de payer la prime de fin d’année, M. X avait méconnu ses obligations d’ordonnateur.
Par suite, c’est à bon droit que la Cour des comptes a jugé que, du fait du manquement du maire à ses obligations, les agents concernés avaient bénéficié d’un avantage pécuniaire injustifié, à défaut de base légale fondant les versements, ayant nécessairement entraîné un préjudice financier pour la commune.
Intérêt personnel ?
Les premiers juges ont estimé qu’en requérant à deux reprises la comptable publique de procéder aux paiements litigieux, M. X aurait fait prévaloir un intérêt moral personnel sur l’intérêt général de la collectivité. Cet intérêt personnel tiendrait au fait qu’en agissant ainsi, M. X aurait cherché à éviter de possibles tensions avec les agents bénéficiaires.
Or, en premier lieu, en matière d’octroi d’un avantage injustifié à autrui, l’existence d’un intérêt personnel direct ou indirect poursuivi par le gestionnaire public ne saurait se déduire du seul manquement de celui-ci à ses obligations législatives ou réglementaires, ni du seul fait que sa décision aurait pu ne pas être en tout point conforme aux meilleures règles de gestion ou qu’elle aurait conduit à méconnaître un objectif d’intérêt général.
En deuxième lieu, la circonstance que le maire aurait eu comme objectif d’éviter un conflit social au sein du personnel communal, ce qu’aucun élément du dossier ne vient au demeurant accréditer, ne suffit pas à établir qu’il aurait agi par intérêt personnel. À supposer même que cette préoccupation n’ait pas été totalement étrangère à sa décision de requérir la comptable publique, si M. X, en cherchant à éviter l’interruption soudaine du paiement d’indemnités versées de bonne foi depuis plus de quarante ans et considérées par les agents, les maires et les comptables successifs jusqu’alors comme un avantage collectivement acquis, aurait certes prévenu le désagrément personnel d’avoir à gérer une possible situation de crise, il aurait surtout évité que ne soit perturbé le fonctionnement des services publics communaux. (…)
Dans les circonstances de l’espèce, l’intérêt personnel, direct ou indirect, que M. X aurait tiré du versement des primes litigieuses ne peut être regardé comme établi. L’appelant est donc fondé à soutenir, pour ce motif, que c’est à tort que la Cour des comptes a jugé que l’infraction prévue à l’article L. 131-12 du code des juridictions financières était caractérisée et qu’elle l’a condamné au paiement d’une amende.
Cour d'appel financière - Affaire n° CAF-2024-03 - n° 2025-04 - 2025-06-20
Les très riches heures de l’arrêt Richwiller
Landot Avocats - Note complète
Avantage injustifié accordé à autrui par un gestionnaire public en méconnaissance de ses obligations
Dans l’arrêt attaqué, la Cour des comptes a relevé qu’en méconnaissance des dispositions mentionnées aux points 7 et 8 du présent arrêt, l’ordre de réquisition du 22 novembre 2022 n’était pas accompagné de la pièce justificative nécessaire et que si l’ordre de réquisition du 23 novembre 2023 était appuyé d’une délibération du 24 septembre 1997 prévoyant l’inscription directement dans le budget de la commune d’une prime de fin d’année précédemment versée par une association du personnel communal, cette délibération, en tout état de cause postérieure au 28 janvier 1984, ne prévoyait pas les conditions d’attribution et le taux moyen de cette prime.
Si cette délibération a été complétée, à la demande du comptable public de l’époque, d’une mention au procès-verbal du conseil municipal du 3 décembre 1997 précisant les conditions de versement et de liquidation de cette prime, les premiers juges ont considéré que cette mention, au demeurant également postérieure au 28 janvier 1984, ne pouvait satisfaire aux exigences posées par l'annexe I précitée de l'article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales, faute de revêtir le caractère d’une décision exécutoire de l’assemblée délibérante.
La Cour des comptes a relevé, dans ces conditions, qu’en refusant à deux reprises de se mettre en conformité avec les dispositions mentionnées ci-dessus et en préférant requérir la comptable publique de payer la prime de fin d’année, M. X avait méconnu ses obligations d’ordonnateur.
Par suite, c’est à bon droit que la Cour des comptes a jugé que, du fait du manquement du maire à ses obligations, les agents concernés avaient bénéficié d’un avantage pécuniaire injustifié, à défaut de base légale fondant les versements, ayant nécessairement entraîné un préjudice financier pour la commune.
Intérêt personnel ?
Les premiers juges ont estimé qu’en requérant à deux reprises la comptable publique de procéder aux paiements litigieux, M. X aurait fait prévaloir un intérêt moral personnel sur l’intérêt général de la collectivité. Cet intérêt personnel tiendrait au fait qu’en agissant ainsi, M. X aurait cherché à éviter de possibles tensions avec les agents bénéficiaires.
Or, en premier lieu, en matière d’octroi d’un avantage injustifié à autrui, l’existence d’un intérêt personnel direct ou indirect poursuivi par le gestionnaire public ne saurait se déduire du seul manquement de celui-ci à ses obligations législatives ou réglementaires, ni du seul fait que sa décision aurait pu ne pas être en tout point conforme aux meilleures règles de gestion ou qu’elle aurait conduit à méconnaître un objectif d’intérêt général.
En deuxième lieu, la circonstance que le maire aurait eu comme objectif d’éviter un conflit social au sein du personnel communal, ce qu’aucun élément du dossier ne vient au demeurant accréditer, ne suffit pas à établir qu’il aurait agi par intérêt personnel. À supposer même que cette préoccupation n’ait pas été totalement étrangère à sa décision de requérir la comptable publique, si M. X, en cherchant à éviter l’interruption soudaine du paiement d’indemnités versées de bonne foi depuis plus de quarante ans et considérées par les agents, les maires et les comptables successifs jusqu’alors comme un avantage collectivement acquis, aurait certes prévenu le désagrément personnel d’avoir à gérer une possible situation de crise, il aurait surtout évité que ne soit perturbé le fonctionnement des services publics communaux. (…)
Dans les circonstances de l’espèce, l’intérêt personnel, direct ou indirect, que M. X aurait tiré du versement des primes litigieuses ne peut être regardé comme établi. L’appelant est donc fondé à soutenir, pour ce motif, que c’est à tort que la Cour des comptes a jugé que l’infraction prévue à l’article L. 131-12 du code des juridictions financières était caractérisée et qu’elle l’a condamné au paiement d’une amende.
Cour d'appel financière - Affaire n° CAF-2024-03 - n° 2025-04 - 2025-06-20
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Landot Avocats - Note complète