Marchés publics - DSP - Achats

Juris - Mise en régie des travaux de reprise des malfaçons et imperfections, aux frais et risques de la société requérante - Absence d'obligation de procédure contradictoire

Article ID.CiTé du 11/05/2022



Aux termes de l'article 41.3 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux (CCAG Travaux) : " Au vu du procès-verbal des opérations préalables à la réception et des propositions du maître d'œuvre, le maître de l'ouvrage décide si la réception est ou non prononcée ou si elle est prononcée avec réserves. S'il prononce la réception, il fixe la date qu'il retient pour l'achèvement des travaux. La décision ainsi prise est notifiée au titulaire dans les trente jours suivant la date du procès-verbal. La réception prend effet à la date fixée pour l'achèvement des travaux. Sauf le cas prévu à l'article 41. 1. 3, à défaut de décision du maître de l'ouvrage notifiée dans le délai précisé ci-dessus, les propositions du maître d'œuvre s'imposent au maître de l'ouvrage et au titulaire / (...) ".

Mise en régie des travaux de levée des réserves
Selon l'article 41.6 du même document contractuel : " Lorsque la réception est assortie de réserves, le titulaire doit remédier aux imperfections et malfaçons correspondantes dans le délai fixé par le représentant du pouvoir adjudicateur ou, en l'absence d'un tel délai, trois mois avant l'expiration du délai de garantie défini à l'article 44. 1. Au cas où ces travaux ne seraient pas faits dans le délai prescrit, le maître de l'ouvrage peut les faire exécuter aux frais et risques du titulaire, après mise en demeure demeurée infructueuse ".
D'autre part, il résulte des règles générales applicables aux contrats administratifs que le maître d'ouvrage de travaux publics qui a vainement mis en demeure son cocontractant d'exécuter l'exécution des prestations qu'il s'est engagé à réaliser conformément aux stipulations du contrat, dispose de la faculté de faire exécuter celles-ci, aux frais et risques de son cocontractant, par une entreprise tierce ou par lui-même. La mesure coercitive de mise en régie, n'a pas pour effet de rompre le lien contractuel entre le pouvoir adjudicateur et son cocontractant et ne saurait être subordonnée à une résiliation préalable du contrat.

Contrats passés par le maître d'ouvrage avec un autre entrepreneur pour la seule reprise de malfaçons
Enfin, si le cocontractant défaillant doit être mis à même de suivre l'exécution d'un marché de substitution conclu entre le maître de l'ouvrage et un autre entrepreneur pour l'achèvement des travaux, les contrats passés par le maître d'ouvrage avec un autre entrepreneur pour la seule reprise de malfaçons auxquelles le titulaire du marché n'a pas remédié ne constituent pas, en principe, des marchés de substitution soumis au droit de suivi de leur exécution.

En l'espèce, le centre hospitalier a assorti de réserves les décisions de réception des phases 1 et 2 des travaux en litige. Contrairement à ce que soutient la société, aucun principe, ni aucune stipulation contractuelle n'empêchait de retenir comme dates d'achèvement des travaux, et par conséquent de prise d'effet des décisions de réception, les dates butoirs fixées pour l'exécution des travaux nécessaires à la levée des réserves. La société n'a pas, dans les délais qui lui étaient impartis par le centre hospitalier, et malgré des mises en demeure des 18 mars 2013 et 4 avril 2014, remédié à l'ensemble des imperfections et malfaçons énumérées en annexe des procès-verbaux alors qu'il n'est pas démontré qu'elle aurait été empêchée de le faire par le maître de l'ouvrage. Dans ces conditions, en application de l'article 41.6 du CCAG Travaux, le centre hospitalier pouvait, comme il l'a fait par les décisions du 8 avril 2013 et 7 novembre 2014, et sans être tenu de mettre en œuvre une procédure contradictoire préalable, décider de procéder à la mise en régie des travaux de reprise des malfaçons et imperfections, aux frais et risques de la société requérante.
Le maître de l'ouvrage était libre de mettre en œuvre cette mesure coercitive en faisant exécuter ces travaux par un autre entrepreneur, sans que cette décision ait eu pour effet de rompre le lien contractuel avec la société, ni ne nécessite une résiliation préalable des marchés.

Les marchés de " mise en conformité " ne constituent pas des marchés de substitution
Il s'ensuit que, contrairement à ce qui est soutenu, les marchés de " mise en conformité " conclus dans ce contexte entre le centre hospitalier et la société E. ne constituent pas des marchés de substitution passés après une mesure de résiliation décidée sur le fondement de l'article 48.2 du CCAG-Travaux, nonobstant la référence à ces dispositions dans les courriers de mise en demeure.

Absence d'obligation de procédure contradictoire
Il en résulte que les moyens tirés de ce que le maître de l'ouvrage n'aurait pas fait procéder au constat contradictoire préalable des travaux à réaliser, en méconnaissance de l'article 48.3 du CCAG-Travaux, de la méconnaissance du droit de suivi des marchés de substitution prévu par les stipulations de l'article 48.5 du même document contractuel et de ce que la société n'a pas non plus été mise à même de suivre l'exécution de prestations de maîtrise d'œuvre, ne sont pas utilement invocables à l'appui de la contestation des décisions de mise en régie des travaux nécessaires à la levée des réserves.


CAA de NANCY N° 19NC01635 - 2022-03-22