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Politique de la ville

La mécanique de rue : vertus cachées d’une économie populaire dénigrée

(Article ID.CiTé/ID.Veille du 22/05/2019 )



La mécanique de rue : vertus cachées d’une économie populaire dénigrée
La mécanique de rue  marque l’espace public des quartiers populaires, attestant l’existence d’une économie de la débrouille. De plus en plus répandues, ces activités informelles de réparation automobile, facilement assimilées à des nuisances et des dégradations du cadre de vie, constituent autant de ressources pour les ménages disposant de peu de revenus.

L’aménagement urbain n’a que rarement pris en compte l’utilisation des espaces publics des quartiers populaires, laissant impensée la manière dont ils pouvaient générer et accommoder des activités improvisées. Parmi celles-ci, il est possible d’observer divers commerces, allant de l’alimentaire au trafic de psychotropes, ainsi que des occupations de l’espace public comme des dépôts ou décharges d’ordures ménagères, d’encombrants, ou encore des services de proximité… La mécanique de rue fait partie de ces activités dessinant une géographie de la débrouille des quartiers populaires. 

L’emprise au sol de certains ateliers de réparation automobile est importante et le nombre de personnes qui vivent de cette activité atteste de son expansion très rapide en Île-de-France depuis une dizaine d’années. Ainsi, pour la seule ville de Stains, il a été possible de dénombrer plus de 300 mécaniciens informels, qui travaillent majoritairement en plein air. Cette présence très visible attire des critiques de la part d’élus qui la renvoient à l’univers de l’illégalité et au registre de la pollution visuelle tout en s’appuyant sur le refus supposé de cette pratique par les riverains.

La mécanique de rue se distingue des traditions ouvrières de petites réparations qui ont suivi la diffusion de l’automobile et ont longtemps été monnaie courante dans les quartiers populaires. Encore présentes dans la région lilloise (Collectif Rosa Bonheur 2014a, 2014b et 2017), ces traditions rappellent les pratiques d’appoint comme les jardins ouvriers (Weber 1989).

À l’inverse, la mécanique de rue qui s’est récemment développée dans les quartiers populaires d’Île-de-France est davantage professionnelle. Ces ateliers à ciel ouvert ont vu le jour dans de nombreux quartiers populaires de périphérie, proposant des services de réparation automobile qui dépassent la simple vérification des niveaux ou le changement d’une roue crevée.

Le terme "mécanique sauvage" est le plus couramment utilisé par les élus et techniciens pour qualifier ces pratiques. Il témoigne d’un double rejet de l’activité par son assimilation à une activité illégale et aux dégradations supposées de l’espace public qu’elle occasionne. Il donne surtout une représentation biaisée d’une activité supposée illégitime alors qu’elle peut être vue comme une véritable ressource collective et un réservoir de savoir-faire : ce que nous préférons appeler une "mécanique clinique"


Métropolitiques - Analyse complète - 2019-05-10











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