RH - Jurisprudence

Le seul fait pour un agent public d’être "fiché S" ne justifie pas une mutation d'office à son égard

(Article ID.CiTé/ID.Veille du 16/11/2020 )



Aux termes du 8° de l'article 2 du décret du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées, peuvent être inscrites dans ce fichier, sous la rubrique " S " : " Les personnes faisant l'objet de recherches pour prévenir des menaces graves pour la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat, dès lors que des informations ou des indices réels ont été recueillis à leur égard ".

Si l'inscription d'une personne dans le fichier des personnes recherchées pour prévenir des menaces graves pour la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat ne saurait, par elle-même, suffire à établir que cette personne présente une telle menace, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, lorsqu'il est informé d'une telle inscription, que la fiche soit ou non produite à l'instance par l'administration qui s'en prévaut, de se forger une conviction au vu de l'argumentation des parties sur ce point, sans qu'il soit tenu d'user de ses pouvoirs d'instruction, notamment en appelant le ministre de l'intérieur dans l'instance, s'il s'estime suffisamment informé par le débat contradictoire entre les parties.

En l'espèce, pour justifier l'édiction des arrêtés en litige, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères s'est borné à invoquer le contexte particulier qui avait suivi les attentats du 13 novembre 2015, caractérisé notamment par le vote d'une loi relative à l'état d'urgence, et de faire état de l'inscription de M. A... dans le fichier des personnes recherchées pour prévenir des menaces graves pour la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat, sans toutefois donner aucun élément sur les motifs de cette inscription.

Il résulte de ce qui a été dit que la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas commis d'erreur de droit en s'abstenant d'user de ses pouvoirs d'instruction pour apprécier la réalité de la menace que pouvait représenter M. A... pour la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat, dès lors qu'elle a estimé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, qu'il résultait du débat contradictoire entre les parties, notamment des éléments produits par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, que l'existence de cette menace n'était pas établie et que, par suite, les arrêtés en litige étaient entachés d'une erreur manifeste d'appréciation.


Conseil d'État N° 436346 - 2020-11-06
 
Dans la même rubrique :