Le 6 mars 2025, le Sénat a adopté en première lecture, avec modifications, la proposition de loi
La proposition de loi vise à renforcer la protection des enseignants victimes de violences, à mieux sécuriser les écoles et responsabiliser les parents. Elle simplifie également le contenu de l'enseignement moral et civique (EMC) et clarifie l'interdiction du port des signes ou tenues à caractère religieux à l'école.
La proposition de loi traduit plusieurs recommandations de la mission sénatoriale d’enquête chargée de dresser un état des lieux des menaces, violences et insultes contre les enseignants, lancée à la suite de l’assassinat du professeur Samuel Paty en 2020. D'après les travaux de cette mission présentés en mars 2024 , les enseignants ressentent de plus en plus de peur dans l'exercice de leur métier. 58 500 d'entre eux ont déclaré avoir été menacés, 17 200 avoir été bousculés intentionnellement ou victimes de violence et 900 avoir été menacés avec une arme au cours de l'année scolaire 2019-2020. En 2021-2022, deux tiers des établissements secondaires ont déclaré un incident grave.
En outre, pour le sénateur Laurent Lafon à l'origine du texte et corapporteur de la mission d'information, les cas de contestations des enseignements sont en hausse ces dernières années tout comme les cas de remises en cause des principes et des valeurs de la République. Si certains territoires sont plus concernés que d'autres, tous les établissements scolaires peuvent être confrontés à ces difficultés.
Laïcité et EMC
Le texte clarifie le périmètre de l’interdiction faite aux élèves de porter des signes ou des tenues religieux ostentatoires dans les établissements scolaires publics, posée il y a plus de vingt ans par la loi du 15 mars 2004. Cette interdiction s’applique également aux sorties scolaires qui ont lieu pendant le temps scolaire, selon la circulaire d'application de la loi datée du 18 mars 2004 . Toutefois, d'après l'auteur de la proposition de loi , des "zones grises" existent pour les activités organisées par les établissements scolaires en dehors du temps scolaire (par exemple remise de prix hors temps scolaire pour un concours organisé en classe). L’article L. 141‑5‑1 du code de l’éducation est donc complété pour préciser que l'interdiction de porter des signes ou de tenues religieux ostentatoires s’applique également "aux élèves qui participent aux activités en lien avec les enseignements, dans ou en dehors des établissements, organisées par ces écoles, collèges et lycées publics, y compris en dehors du temps scolaire."
Le contenu de l’enseignement moral et civique est simplifié. L’article L.312-15 du code de l’éducation qui le précise a, en effet, été modifié à plusieurs reprises par ajouts successifs (sur la protection de l’enfance, l’école inclusive, l’engagement associatif et civique, la lutte contre le harcèlement, le respect des animaux...). Il en résulterait un "enseignement à la carte", à rebours de l’objectif de l’EMC de disposer d’une culture citoyenne commune. L'EMC est ainsi recentré sur la connaissance des institutions, le développement du sens critique, la compréhension des enjeux internationaux, sociétaux et environnementaux ainsi que sur la formation aux valeurs et principes de la République.
Protection des enseignants et des chefs d'établissements
La proposition contient plusieurs mesures pour renforcer la protection des enseignants et des autres personnels des établissements scolaires.
En cas violences, de menaces ou d’outrages commis contre un agent de l'éducation nationale ou de l'enseignement supérieur, l'administration devra lui accorder automatiquement et sans délai la protection fonctionnelle. Une demande de l'agent ne sera plus nécessaire (contrairement à ce que prévoyait le texte initial).
Dans ces mêmes situations, l'administration devra déposer plainte en lieu et place de l'agent de l'éducation nationale victime, avec son accord (ou avec celui de ses ayants-droits s'il est décédé). Il s'agit de rendre plus systématique le dépôt de plainte.
Les sénateurs ont complété ce volet sur deux points :
- un amendement a aggravé les peines encourues notamment pour des faits de violence et de harcèlement commis contre les enseignants, les autres personnels et chefs d'établissements scolaires (par exemple 2 ans de prison et 30 000 euros d’amende pour harcèlement moral et 30 ans de prison dans les cas les plus graves pour les violences en bande organisée ou avec guet-apens, avec usage ou menace d’une arme, ayant entrainé la mort) ;
- un autre amendement prévoit d'interdire à l’administration de transmettre les coordonnées personnelles des agents de l’éducation, en particulier leur numéro de téléphone, aux parents d’élèves.
Cette interdiction entend prévenir le risque d'intrusion chez les professeurs en particulier.
Par ailleurs, les autorités académiques et les chefs d'établissements publics comme privés devront être informés par l'autorité judiciaire en cas de mise en examen ou de condamnation pour terrorisme d’un élève scolarisé ou d'un futur élève. Cette mesure a déjà été votée dans le cadre de la proposition de loi sénatoriale instituant des mesures judiciaires de sûreté applicables aux condamnés terroristes et renforçant la lutte antiterroriste .
Sécurité des élèves et responsabilisation des parents
Des dispositions permettront de mieux sécuriser les écoles. Un nouvel article a été introduit pour autoriser un chef d'établissement, son adjoint ou un conseiller pédagogique d'éducation (CPE), à inspecter visuellement le sac ou le casier d'un élève et à les fouiller avec son accord ou celui de ses parents s'il est mineur.
Un décret devra fixer "les conditions dans lesquelles le chef d'établissement peut faire signer à l'élève ou à son représentant légal s'il est mineur, une autorisation annuelle, limitée aux risques d'atteinte grave à l'ordre public, de fouille des effets personnels de l'élève". Cet article vient sécuriser la base juridique des inspections visuelles et ouvre la possibilité d'une fouille des affaires personnelles des élèves.
Le texte amendé entend enfin responsabiliser les parents vis-à-vis du comportement de leur enfant. En cas de violation des règles de l'établissement et de non-respect du personnel, le directeur académique adressera un avertissement à l'élève et à ses parents, avec rappel des obligations et des sanctions. Une enquête sociale pourra être diligentée. Le directeur académique pourra convoquer les parents et proposer une sanction en cas de persistance des troubles.
De plus, dans les écoles, les collèges et les lycées, une information annuelle devra être délivrée aux élèves et leurs parents sur "l’importance du respect des personnels, des règles de bon fonctionnement et de vie collective, de l’ordre et de la sécurité au sein de l’établissement".
Assemblée nationale Dossier législatif
Protéger l’école de la république et les personnels qui y travaillent
Synthèse
La proposition de loi vise à renforcer la protection des enseignants victimes de violences, à mieux sécuriser les écoles et responsabiliser les parents. Elle simplifie également le contenu de l'enseignement moral et civique (EMC) et clarifie l'interdiction du port des signes ou tenues à caractère religieux à l'école.
La proposition de loi traduit plusieurs recommandations de la mission sénatoriale d’enquête chargée de dresser un état des lieux des menaces, violences et insultes contre les enseignants, lancée à la suite de l’assassinat du professeur Samuel Paty en 2020. D'après les travaux de cette mission présentés en mars 2024 , les enseignants ressentent de plus en plus de peur dans l'exercice de leur métier. 58 500 d'entre eux ont déclaré avoir été menacés, 17 200 avoir été bousculés intentionnellement ou victimes de violence et 900 avoir été menacés avec une arme au cours de l'année scolaire 2019-2020. En 2021-2022, deux tiers des établissements secondaires ont déclaré un incident grave.
En outre, pour le sénateur Laurent Lafon à l'origine du texte et corapporteur de la mission d'information, les cas de contestations des enseignements sont en hausse ces dernières années tout comme les cas de remises en cause des principes et des valeurs de la République. Si certains territoires sont plus concernés que d'autres, tous les établissements scolaires peuvent être confrontés à ces difficultés.
Laïcité et EMC
Le texte clarifie le périmètre de l’interdiction faite aux élèves de porter des signes ou des tenues religieux ostentatoires dans les établissements scolaires publics, posée il y a plus de vingt ans par la loi du 15 mars 2004. Cette interdiction s’applique également aux sorties scolaires qui ont lieu pendant le temps scolaire, selon la circulaire d'application de la loi datée du 18 mars 2004 . Toutefois, d'après l'auteur de la proposition de loi , des "zones grises" existent pour les activités organisées par les établissements scolaires en dehors du temps scolaire (par exemple remise de prix hors temps scolaire pour un concours organisé en classe). L’article L. 141‑5‑1 du code de l’éducation est donc complété pour préciser que l'interdiction de porter des signes ou de tenues religieux ostentatoires s’applique également "aux élèves qui participent aux activités en lien avec les enseignements, dans ou en dehors des établissements, organisées par ces écoles, collèges et lycées publics, y compris en dehors du temps scolaire."
Le contenu de l’enseignement moral et civique est simplifié. L’article L.312-15 du code de l’éducation qui le précise a, en effet, été modifié à plusieurs reprises par ajouts successifs (sur la protection de l’enfance, l’école inclusive, l’engagement associatif et civique, la lutte contre le harcèlement, le respect des animaux...). Il en résulterait un "enseignement à la carte", à rebours de l’objectif de l’EMC de disposer d’une culture citoyenne commune. L'EMC est ainsi recentré sur la connaissance des institutions, le développement du sens critique, la compréhension des enjeux internationaux, sociétaux et environnementaux ainsi que sur la formation aux valeurs et principes de la République.
Protection des enseignants et des chefs d'établissements
La proposition contient plusieurs mesures pour renforcer la protection des enseignants et des autres personnels des établissements scolaires.
En cas violences, de menaces ou d’outrages commis contre un agent de l'éducation nationale ou de l'enseignement supérieur, l'administration devra lui accorder automatiquement et sans délai la protection fonctionnelle. Une demande de l'agent ne sera plus nécessaire (contrairement à ce que prévoyait le texte initial).
Dans ces mêmes situations, l'administration devra déposer plainte en lieu et place de l'agent de l'éducation nationale victime, avec son accord (ou avec celui de ses ayants-droits s'il est décédé). Il s'agit de rendre plus systématique le dépôt de plainte.
Les sénateurs ont complété ce volet sur deux points :
- un amendement a aggravé les peines encourues notamment pour des faits de violence et de harcèlement commis contre les enseignants, les autres personnels et chefs d'établissements scolaires (par exemple 2 ans de prison et 30 000 euros d’amende pour harcèlement moral et 30 ans de prison dans les cas les plus graves pour les violences en bande organisée ou avec guet-apens, avec usage ou menace d’une arme, ayant entrainé la mort) ;
- un autre amendement prévoit d'interdire à l’administration de transmettre les coordonnées personnelles des agents de l’éducation, en particulier leur numéro de téléphone, aux parents d’élèves.
Cette interdiction entend prévenir le risque d'intrusion chez les professeurs en particulier.
Par ailleurs, les autorités académiques et les chefs d'établissements publics comme privés devront être informés par l'autorité judiciaire en cas de mise en examen ou de condamnation pour terrorisme d’un élève scolarisé ou d'un futur élève. Cette mesure a déjà été votée dans le cadre de la proposition de loi sénatoriale instituant des mesures judiciaires de sûreté applicables aux condamnés terroristes et renforçant la lutte antiterroriste .
Sécurité des élèves et responsabilisation des parents
Des dispositions permettront de mieux sécuriser les écoles. Un nouvel article a été introduit pour autoriser un chef d'établissement, son adjoint ou un conseiller pédagogique d'éducation (CPE), à inspecter visuellement le sac ou le casier d'un élève et à les fouiller avec son accord ou celui de ses parents s'il est mineur.
Un décret devra fixer "les conditions dans lesquelles le chef d'établissement peut faire signer à l'élève ou à son représentant légal s'il est mineur, une autorisation annuelle, limitée aux risques d'atteinte grave à l'ordre public, de fouille des effets personnels de l'élève". Cet article vient sécuriser la base juridique des inspections visuelles et ouvre la possibilité d'une fouille des affaires personnelles des élèves.
Le texte amendé entend enfin responsabiliser les parents vis-à-vis du comportement de leur enfant. En cas de violation des règles de l'établissement et de non-respect du personnel, le directeur académique adressera un avertissement à l'élève et à ses parents, avec rappel des obligations et des sanctions. Une enquête sociale pourra être diligentée. Le directeur académique pourra convoquer les parents et proposer une sanction en cas de persistance des troubles.
De plus, dans les écoles, les collèges et les lycées, une information annuelle devra être délivrée aux élèves et leurs parents sur "l’importance du respect des personnels, des règles de bon fonctionnement et de vie collective, de l’ordre et de la sécurité au sein de l’établissement".
Assemblée nationale Dossier législatif
Protéger l’école de la république et les personnels qui y travaillent
Synthèse