Urbanisme et aménagement

Parl. - Proposition de loi visant à renforcer l'accompagnement des élus locaux dans la mise en œuvre de la lutte contre l'artificialisation des sols (Texte adopté)

Article ID.CiTé du 28/06/2023



Les députés ont voté le projet de loi le 27 juin.

En France, 6 à 9% des sols sont artificialisés, c'est-à-dire qu'ils ont connu une altération de leurs fonctions naturelles en raison d'activités humaines. Au cours de la dernière décennie, entre 20 000 et 30 000 hectares ont été artificialisés chaque année en moyenne, principalement au détriment de surfaces agricoles.

La 
loi climat et résilience du 22 août 2021  a formulé un double objectif : réduire de moitié le rythme d'artificialisation nouvelle entre 2021 et 2031 par rapport à la décennie précédente et atteindre d'ici à 2050 une artificialisation nette de 0% (ZAN), c'est-à-dire au moins autant de surfaces "renaturées" que de surfaces artificialisées.

Concrètement, ces objectifs se traduisent par des obligations applicables aux collectivités territoriales. Toutefois, pour les auteurs de la proposition de loi, un an et demi après l'adoption de la loi climat et résilience, l'État ne permet toujours pas aux élus locaux d'anticiper leurs obligations sur la période 2021-2031, s'affranchit de toute responsabilité et met la lutte contre l'artificialisation à la seule charge des collectivités locales.

C'est pourquoi la proposition de loi entend faciliter la mise en oeuvre des objectifs de "ZAN" de la loi Climat-résilience dans les territoires par un meilleur partage de l’effort de réduction de l’artificialisation entre l’État et les territoires et des conditions adaptées pour permettre aux communes, en particulier rurales, de pouvoir conduire des projets essentiels à leur développement.

Elle s'articule autour de quatre axes d'action :
1. Favoriser le dialogue territorial et renforcer la gouvernance décentralisée en :
- prolongeant d'un an le délai de modification des documents régionaux et en adaptant les étapes de la procédure de modification du 
schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet)  ;
- restaurant un rapport de prise en compte plutôt que de compatibilité entre les documents régionaux et les documents d’urbanisme locaux ;
- instaurant une gouvernance décentralisée du ZAN.

2. Accompagner les projets structurants de demain en :
- prévoyant que les grands projets d'envergure nationale ou européenne fassent l'objet d'une comptabilisation séparée (au sein d'une enveloppe nationale) et ne pèsent pas ainsi sur les enveloppes des collectivités ;
- facilitant la mutualisation des projets d'ampleur régionale, avec un droit de proposition pour les communes et les 
EPCI .

3. Mieux prendre en compte les spécificités des territoires en :
- améliorant la prise en compte des efforts de réduction de l'artificialisation déjà accomplis par les collectivités territoriales ;
- garantissant à chaque commune une "surface minimale de développement communale" d'un hectare ;
- sanctuarisant une "part réservée au développement territorial" pour les projets d'intérêt général non anticipés ou qui ne rentreraient pas dans les enveloppes initiales affectées aux communes et aux EPCI ;
- protégeant mieux les espaces verts et la nature en ville ;
- prenant en compte l'impact du recul du 
trait de côte  et en n'empêchant pas la recomposition spatiale du littoral ;
- prenant en compte les spécificités des territoires de montagne et ultramarins au regard du ZAN.

4. Prévoir des outils de transition vers le ZAN en :
- incitant l'État à transmettre rapidement aux collectivités territoriales des données d'artificialisation complètes et fiables ;
- luttant contre la spéculation foncière et la ruée vers le foncier grâce à un "sursis à statuer ZAN" et un "droit de préemption ZAN" ;
- prenant en compte dès 2021 les efforts de renaturation des collectivités.

Les sénateurs avait adopté des amendements afin, entre autres :
- de simplifier et préciser la surface de développement communal ;
- de préciser les finalités du droit de préemption ZAN en matière de continuités écologiques ;
- d'inclure les projets d'intérêt pour la souveraineté économique nationale ou européenne parmi les grands projets afin que leur impact en termes d'artificialisation ne soit pas imputé aux collectivités territoriales d'accueil ;
- de ne pas comptabiliser l'artificialisation liée aux bâtiments agricoles ;
- de faciliter le recours au droit de préemption ZAN afin que les collectivités territoriales puissent réagir plus vite dans la période transitoire ;
- de clarifier le statut des friches de surfaces artificialisées.

Les députés ont validé des propositions du Sénat ou sont revenus sur certaines d'entre elles. Ils ont notamment :
- réduit de 42 à 36 mois le délai de modification des Sraddet par les régions pour y inclure les objectifs et trajectoires de réduction de l'artificialisation prévus par la loi Climat-résilience ;
- précisé la définition de la "garantie rurale", la surface minimale de développement d'un hectare par an, garantie à chaque commune durant la période 2021-2031.
Ils l'ont réservé aux "communes peu denses ou très peu denses" au sens de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) - soit un total de 30 775 communes rurales. Ces communes devront aussi être dotées d'un document d'urbanisme antérieur au 22 août 2026 ;
- prévu qu'un "forfait national" de 15 000 hectares pour la décennie 2021-2031 serait soustrait de l'enveloppe ZAN (sur les 125 000 hectares artificialisables) afin de les réserver aux projets d'ampleur nationale ou européenne. Les régions se répartiraient les 110.000 hectares restant. La liste de ces grands projets décomptés à part a été réduite (lignes ferroviaires à grande vitesse, opérations intéressant la défense ou la sécurité nationale, établissements pénitentiaires, travaux déclarés d'intérêt public, projets industriels d'intérêt majeur…) ;
- supprimé le droit de préemption portant sur les espaces propices à la renaturation et au recyclage foncier introduit par le Sénat.

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 Dossier législatif

Zéro artificialisation nette (ZAN) : comment protéger les sols ?