RH - Jurisprudence

RH - Jurisprudence // Faits reprochés à un agent, s’inscrivant dans un contexte conflictuel - Une sanction d’exclusion temporaire n’est pas « trop légère » comme le pensait la commune

(Article ID.CiTé/ID.Veille du 16/03/2022 )



Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 visée ci-dessus : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Troisième groupe : l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ; (...) Parmi les sanctions du premier groupe, seuls le blâme et l'exclusion temporaire de fonctions sont inscrits au dossier du fonctionnaire. Ils sont effacés automatiquement au bout de trois ans si aucune sanction n'est intervenue pendant cette période. / L'exclusion temporaire de fonctions, qui est privative de toute rémunération, peut être assortie d'un sursis total ou partiel (...) ". Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il lui appartient également de rechercher si la sanction proposée par un conseil de discipline de recours est proportionnée à la gravité des fautes qui lui sont reprochées.

La commune a saisi le conseil de discipline de recours, dans le cadre d'une procédure de révocation de M. B..., à la suite de manquements graves et répétés de celui-ci à son devoir de réserve, de la tenue de propos injurieux, diffamants, homophobes et de la profération de menaces de mort et de chantage. Elle conteste l'avis du 9 juin 2017 de ce conseil, proposant de substituer à la sanction de révocation, une sanction d'exclusion temporaire d'une durée d'un an dont six mois avec sursis.

Il ressort des pièces du dossier et notamment de constats d'huissier que de février à juillet 2016, M. B... s'est livré, à l'occasion de discussions sur le réseau social " Facebook ", à des propos injurieux, a manqué à son devoir de réserve, a tenu des propos particulièrement triviaux à connotation homophobe envers un membre de la municipalité et porté atteinte à l'image de la municipalité, à plusieurs reprises en critiquant violemment les actions de la commune. Il a été jusqu'à publier une photographie d'un fusil équipé d'un viseur avec un commentaire menaçant. M. B... ne conteste pas ces faits. Il a d'ailleurs fait l'objet d'une condamnation par un jugement du tribunal correctionnel de Béthune du 24 octobre 2017 à une peine de deux mois d'emprisonnement avec sursis notamment pour injure publique et diffamation envers un dépositaire de l'autorité et pour menace de mort à l'encontre d'un élu municipal. De tels faits particulièrement graves et réitérés sur une durée de six mois sont de nature à justifier une sanction disciplinaire.

Toutefois ces faits prennent place dans un contexte conflictuel, généré par la suppression de la pointeuse et l'installation de caméras de surveillance à l'hôtel de ville, ayant créé un climat de tension entre la municipalité et M. B... en sa qualité de représentant syndical. La tension avec ce dernier a été exacerbée par des publications, sur un site internet, néanmoins sans lien direct avec la municipalité, d'attaques personnelles concernant M. B... et sa fille.

Par ailleurs, comme l'indiquait M. B... devant le conseil de discipline de recours, il était alors suivi pour un syndrome antidépressif en lien avec son travail et au cours des six mois en question, la commune ne l'a pas rappelé aux devoirs liés à son statut de fonctionnaire territorial. Enfin, M. B... n'a fait l'objet d'aucune sanction disciplinaire antérieure. Dans ces conditions, la commune appelante n'est pas fondée à soutenir que l'avis de la commission de discipline de recours comporte une proposition de sanction disproportionnée. Par suite, les moyens tirés d'une erreur d'appréciation ou d'une erreur de droit dont serait entaché l'avis du conseil de discipline de recours et le jugement du tribunal administratif de Lille doivent être écartés.

Il résulte de tout ce qui précède que la commune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.


CAA de DOUAI N° 21DA00209 - 2022-02-24
 
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