RH - Jurisprudence

RH - Jurisprudence // Une auxiliaire de puériculture oubliant un enfant dans les locaux de la crèche - Faute disciplinaire, alors que l’incident est involontaire et sans conséquence pour l’enfant

(Article ID.CiTé/ID.Veille du 01/06/2022 )



Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il lui appartient également de rechercher si la sanction proposée par un conseil de discipline de recours statuant sur le recours d'un fonctionnaire territorial est proportionnée à la gravité des fautes qui lui sont reprochées.

Il est notamment reproché à Mme D... d'avoir, le 7 septembre 2017, oublié et enfermé dans les locaux de la halte-garderie un enfant qui était sous sa garde et sa surveillance, de ne pas avoir respecté les horaires d'ouverture de l'établissement et de s'être absentée sans autorisation dans l'après-midi. Il lui est également reproché l'absence de mise en place d'une procédure de pointage fiable des enfants à leur sortie de la structure et de contrôle de la présence des enfants au sein de la halte-garderie et d'en avoir exclu des enfants alors qu'ils étaient en période d'adaptation.
En l'absence de dispositions législatives contraires, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, à laquelle il incombe d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction à un agent public, peut apporter la preuve de ces faits devant le juge administratif par tout moyen.

Etablir les faits tout en respectant l’obligation de loyauté
Tout employeur public est tenu, vis-à-vis de ses agents, à une obligation de loyauté. Il ne saurait, par suite, fonder une sanction disciplinaire à l'encontre de l'un de ses agents sur des pièces ou documents qu'il a obtenus en méconnaissance de cette obligation, sauf si un intérêt public majeur le justifie. Il appartient au juge administratif, saisi d'une sanction disciplinaire prononcée à l'encontre d'un agent public, d'en apprécier la légalité au regard des seuls pièces ou documents que l'autorité investie du pouvoir disciplinaire pouvait ainsi retenir.
Il résulte de l'instruction et notamment des images extraites de la vidéo surveillance installée devant la halte-garderie ainsi que des nombreuses attestations produites par la commune et, plus particulièrement celles émanant du directeur de la police municipale, du directeur adjoint des services, de la directrice générale adjointe des services en charge de la Petite Enfance, de la cheffe du service Petite Enfance et de l'adjointe administrative de ce service, que, le 7 septembre 2017, Mme D... a quitté, en même temps que la directrice de la structure et que deux de ses autres collègues, les locaux de la structure avant l'heure réglementaire - 17h30 - en y laissant un enfant de 21 mois qui dormait dans le dortoir.
Il résulte également de l'instruction que, alors que Mme D... qui était, après la directrice, l'agent le plus qualifié de la halte-garderie, ne pouvait ignorer l'absence de tout système de pointage de sortie des enfants au moment de leur restitution aux familles, n'a pris aucune mesure ni interrogé ses collègues pour s'assurer que tous les enfants avaient quitté la structure avant de fermer celle-ci prématurément lors de son retour au sein de cette dernière. D'ailleurs, elle expose dans ses écritures s'être uniquement fiée à l'habitude selon laquelle aucun enfant ne dormait à l'heure où elle est revenue à la crèche après s'en être absentée.

Sanction disciplinaire
Par suite, l'oubli et l'enfermement sur place d'un enfant qui était sous sa garde et sa surveillance, à cette occasion, caractérise, un manquement de l'intéressée à ses obligations professionnelles, justifiant que lui fût infligée une sanction disciplinaire. A cet égard, l'intéressée ne peut utilement se prévaloir de ce qu'il s'agit d'un " incident involontaire " demeuré sans incidence pour l'enfant concerné, ni de ce que les parents de ce dernier ont ensuite maintenu leur confiance à l'établissement, ni de ses qualifications professionnelles et de ce qu'elle n'aurait jamais été sanctionnée antérieurement.
Il résulte de ce qui vient d'être dit que c'est à tort que le conseil de discipline de recours a estimé que de tels faits, qui constituent des manquements aux obligations professionnelles, ne présentaient pas un caractère fautif de nature à justifier une sanction disciplinaire et c'est donc à bon droit que les premiers juges ont annulé l'avis émis par cette instance le 15 juin 2018. Il suit de là que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal a annulé cet avis.


CAA de MARSEILLE N° 21MA01009 - 2022-05-12


Faits involontaires et sans incidences constituant des manquements aux obligations professionnelles - Sanction disciplinaire (Bulletin du 31/03/2021)
CAA de MARSEILLE N° 19MA04107 - 2021-03-04

 
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