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RH - Jurisprudence

Infractions d'outrage et d'injure publique - L'outrage qui porte atteinte à la dignité des fonctions exercées et au respect qui leur est dû, constitue un abus de la liberté d'expression qui porte atteinte à l'ordre public et aux droits des tiers

(Article ID.CiTé/ID.Veille du 14/04/2021 )



Infractions d'outrage et d'injure publique - L'outrage qui porte atteinte à la dignité des fonctions exercées et au respect qui leur est dû, constitue un abus de la liberté d'expression qui porte atteinte à l'ordre public et aux droits des tiers
Le Conseil constitutionnel est saisi de l'article 433-5 du code pénal  dans sa rédaction résultant de la loi du 28 février 2017, de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 6 mai 1944, de l'article 30 de la même loi dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 19 septembre 2000, de l'article 31 de cette même loi dans sa rédaction résultant de la loi du 5 août 2013 et de l'article 33 de la loi du 29 juillet 1881 dans sa rédaction résultant de la loi du 27 janvier 2017.

Le requérant reproche à ces dispositions, telles qu'interprétées par la Cour de cassation, d'opérer une confusion entre l'incrimination d'outrage et celle d'injure publique.
Selon lui, parce qu'elles partageraient les mêmes éléments constitutifs et protègeraient les mêmes valeurs sociales, ces deux incriminations pourraient ainsi punir des faits identiques, ce qui permettrait aux autorités de poursuite de choisir discrétionnairement l'une ou l'autre de ces incriminations. Compte tenu des différences notables de régime juridique entre ces deux infractions, il en résulterait une violation du principe d'égalité devant la loi pénale, du droit à un recours juridictionnel effectif ainsi que des droits de la défense.
Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les deux premiers alinéas de l'article 433-5 du code pénal.

Grief tiré de la méconnaissance de la liberté d'expression :
Aux termes de l'article 11 de la Déclaration de 1789 : «La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi». L'article 34 de la Constitution dispose : «La loi fixe les règles concernant ... les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques».

Sur ce fondement, il est loisible au législateur d'édicter des règles concernant l'exercice du droit de libre communication et de la liberté de parler, d'écrire et d'imprimer. Il lui est également loisible, à ce titre, d'instituer des incriminations réprimant les abus de l'exercice de la liberté d'expression et de communication qui portent atteinte à l'ordre public et aux droits des tiers. Cependant, la liberté d'expression et de communication est d'autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l'une des garanties du respect des autres droits et libertés.

Il s'ensuit que les atteintes portées à l'exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l'objectif poursuivi.
L'outrage à personne chargée d'une mission de service public ou dépositaire de l'autorité publique, qui porte atteinte à la dignité des fonctions ainsi exercées et au respect qui leur est dû, constitue un abus de la liberté d'expression qui porte atteinte à l'ordre public et aux droits des tiers. En punissant cet abus, selon le cas, d'une peine maximale de six mois à deux ans d'emprisonnement et d'une amende maximale de 7 500 euros à 30 000 euros, le législateur n'a pas porté à la liberté d'expression une atteinte qui ne serait pas nécessaire, adaptée et proportionnée. Le grief tiré de la méconnaissance de la liberté d'expression doit donc être écarté.

Les dispositions contestées, qui ne méconnaissent pas non plus le droit à un recours juridictionnel effectif et les droits de la défense ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution.

>> Les deux premiers alinéas de l'article 433-5 du code pénal, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2017-258 du 28 février 2017 relative à la sécurité publique, sont conformes à la Constitution.

Conseil constitutionnel - Décision n° 2021-896 QPC - 2021-04-089
 







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