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RH - Jurisprudence

Abaissement brutal de la notation et harcèlement moral

(Article ID.CiTé/ID.Veille du 22/09/2020 )



Abaissement brutal de la notation et harcèlement moral
Aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ".

Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Dès lors qu'elle n'excède pas ces limites, une simple diminution des attributions justifiée par l'intérêt du service, en raison d'une manière de servir inadéquate ou de difficultés relationnelles, n'est pas constitutive de harcèlement moral.

En l'espèce, si M. B... a fait preuve, à plusieurs reprises, d'un comportement peu coopératif et d'attitudes irrespectueuses à l'égard de ses supérieurs hiérarchiques, pour lesquels il a été réprimandé ou sanctionné, en particulier par un avertissement prononcé le 9 mai 2013, puis par une exclusion temporaire de trois jours prononcée le 29 août 2014 et exécutée à compter du 2 septembre 2014, l'intéressé, engagé en qualité d'agent d'entretien en 2003, promu au grade d'agent de maîtrise et dont la nomination au principalat de ce grade avait été envisagée en 2012, avait cependant constamment fait l'objet, jusqu'en 2014, d'évaluations favorables avec notamment, depuis 2008, des notes supérieures à 18,20 sur 20, assorties de commentaires soulignant ses aptitudes professionnelles.

Il en ressort, d'autre part, qu'à compter de 2014, la notation de M. B... a été abaissée à 12,55 sur 20 et assortie d'appréciations particulièrement négatives, sans que la commune n'établisse que cette évolution aurait correspondu à une modification substantielle du comportement ou des aptitudes professionnelles de l'intéressé, qu'il a été régulièrement affecté à des tâches sans rapport avec ses capacités techniques, sans que la commune n'établisse que ces affectations étaient imposées par les besoins du service et qu'il a été confronté à l'hostilité manifeste de sa hiérarchie et de représentants de l'exécutif municipal, qui s'est traduite, en particulier, par des propos humiliants tenus publiquement à son encontre ainsi que par l'exercice de pressions sur ceux des agents communaux qui avaient accepté de témoigner en sa faveur.

Par suite, la cour a pu, après avoir relevé la brutale dégradation de la notation de M. B..., déduire, sans les dénaturer, de ces éléments, corroborés par des attestations dont les termes concordants ne suffisaient pas à écarter le caractère probant, que l'intéressé avait fait l'objet de la part de sa hiérarchie d'une surveillance étroite visant à le prendre en faute, de brimades et de propos vexatoires et, en l'absence d'éléments suffisamment probants produits en sens inverse par la commune, n'a pas inexactement qualifié les faits en jugeant que ces éléments étaient constitutifs de harcèlement moral.

Conseil d'État N° 428283 - 2020-07-29

 



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