ID CiTé - Veille juridique et professionnelle des collectivités territoriales





RH - Rép. Ministérielles

RH-R.M - Interdiction des emplois familiaux dans les cabinets des petites communes rurales et exécutifs locaux ?

(Article ID.CiTé/ID.Veille du 01/06/2018 )



RH-R.M - Interdiction des emplois familiaux dans les cabinets des petites communes rurales et exécutifs locaux ?
L'article 15 de la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique modifie l'article 110 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale relatif aux collaborateurs de cabinet. L'autorité territoriale a interdiction de compter parmi les membres de son cabinet les membres les plus proches de sa famille : son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité (PACS) ou concubin, ses parents et enfants ou ceux de son conjoint, partenaire lié par un PACS ou concubin. Le champ d'application de la loi porte uniquement sur les collaborateurs de cabinet, recrutés sur le fondement de l'article 110 de la loi précitée du 26 janvier 1984 et du décret n° 87-1004 du 16 décembre 1987 relatif aux collaborateurs de cabinet des autorités territoriales. Les secrétaires de mairie recrutés en qualité d'agent contractuel pour exercer les missions du cadre d'emplois des secrétaires de mairie, dont le statut particulier est fixé par le décret n° 87-1103 du 30 décembre 1987, ne relèvent donc pas de ces dispositions. 

Pour autant, il ressort de la jurisprudence aussi bien administrative que judiciaire que le recrutement par une autorité territoriale de membres de sa famille sur d'autres emplois de sa collectivité peut comporter un risque pénal résultant de l'intérêt moral qu'aurait l'intéressé à recruter un membre de sa famille et susceptible d'être qualifié de prise illégale d'intérêts prévue à l'article 432-12 du code pénal. Le délit de prise illégale d'intérêts "est caractérisé par la prise d'un intérêt matériel ou moral, direct ou indirect et se consomme par le seul abus de la fonction indépendamment de la recherche d'un gain ou de tout autre avantage personnel"(Cour de cassation, chambre criminelle, 21 juin 2000, n° 99-86871). 

Ainsi un maire qui "a décidé seul des recrutements de ses enfants", sans respecter la durée limitée à trois ans des contrats de travail du personnel recruté sans concours, "a privilégié ses enfants au mépris des prescriptions légales et a ainsi pris un intérêt moral dans l'attribution de ces deux postes, alors qu'il avait la surveillance de ces opérations et en assurait le paiement" et est coupable de prise illégale d'intérêts (Cour de cassation, chambre criminelle, 8 mars 2006, n° 05-85276).

De même, "le fait pour un élu chargé d'assurer la surveillance ou l'administration de l'exécution du budget de la commune de recruter ou de faire recruter un de ses enfants sur un emploi de la commune est susceptible d'exposer cet élu à l'application des dispositions de l'article 432-12 du code pénal" (Conseil d'État, 27 juillet 2005, n° 263714). 

Le juge, pour apprécier la prise illégale d'intérêts, prend en considération le respect de la procédure de recrutement (publicité de la vacance de poste, délai raisonnable préalable au recrutement permettant de recevoir des candidatures), l'adéquation entre la formation et l'expérience professionnelle de l'agent et l'emploi à pourvoir, et, lorsqu'il s'agit de recruter un agent contractuel, l'absence de candidature d'un agent titulaire en application de la réglementation (Cour de cassation, chambre criminelle, 5 décembre 2012, n° 12-80032 - cour administrative d'appel de Paris, 13 octobre 2009, n° 08PA01647). 

Aucune jurisprudence identifiée ne porte sur le recrutement d'un membre de la famille proche de l'élu qui aurait la qualité d'agent titulaire de la fonction publique.
Pour autant, en cas de contentieux sur ce sujet, il est vraisemblable que le juge prendra en considération les mêmes éléments, sous réserve des spécificités liées au recrutement d'un fonctionnaire. 
S'agissant d'un recrutement dans la même collectivité d'un collaborateur de cabinet licencié compte tenu de son lien familial avec l'autorité territoriale, il est à noter que le juge a pu prendre en compte, pour démontrer l'intention frauduleuse, la volonté de l'élu, après une première embauche qui s'est avérée illégale, de recruter à nouveau le même membre de la famille par le biais d'une autre procédure (cour d'appel de Rouen, 2 novembre 2006, n°06/00016). Cette affaire concernait uniquement des recrutements sur contrats. Elle n'est donc pas directement applicable à un fonctionnaire mais pourrait être transposée. 

Enfin et pour mémoire, il faut que le nouveau poste occupé ne soit pas assimilable à un emploi de cabinet. 
Des emplois rattachés aux services de la collectivité ont ainsi pu être requalifiés, par le juge, d'emplois de collaborateur de cabinet, en conséquence soumis à la réglementation spécifique qui s'y applique : statut de contractuel, limitation du nombre, et désormais, interdiction de recruter certains membres de la famille.

Sénat - R.M. N° 01933  - 2018-04-12







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