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Eau - Assainissement

Protection des captages d’eau - Le Conseil Constitutionnel censure les mesures transitoires, avec effet immédiat et application à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date

Article ID.CiTé du 15/02/2021



Protection des captages d’eau - Le Conseil Constitutionnel censure les mesures transitoires, avec effet immédiat et application à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date

L'article 61  de la loi du 24 juillet 2019 réforme, à son paragraphe III, la procédure d'instauration des périmètres de protection des captages d'eau potable prévue à l'article L. 1321-2 du code de la santé publique. Le paragraphe IX de cet article 61 prévoit : «Les deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 1321-2 du code de la santé publique, dans leur rédaction résultant des a et b du 1 ° du III du présent article, ne s'appliquent pas aux captages d'eau pour lesquels un arrêté d'ouverture d'une enquête publique relative à l'instauration d'un périmètre de protection a été publié à la date de publication de la présente loi».

Les requérants reprochent à ces dispositions de maintenir, pour tous les captages d'eau pour lesquels un arrêté d'ouverture d'une enquête publique relative à l'instauration d'un périmètre de protection a été publié à la date de publication de la loi du 24 juillet 2019, le régime antérieur à cette loi, alors que le nouveau régime ne permet plus l'instauration d'un périmètre de protection rapprochée pour ceux bénéficiant d'une protection naturelle ou pour certains captages à faible débit.

Or, selon eux, en exigeant désormais uniquement un simple périmètre de protection immédiate autour de ces captages, le législateur aurait reconnu que l'adjonction d'un périmètre de protection rapprochée n'était plus nécessaire pour assurer la protection de la qualité de l'eau. La mise en place d'un tel périmètre étant susceptible d'entraîner d'importantes servitudes pour les propriétaires des terrains qui en sont grevés, le législateur ne pouvait dès lors prévoir le maintien du régime antérieur en se fondant sur le seul critère tenant à la publication d'un arrêté d'ouverture d'une enquête publique. Il en résulterait une atteinte disproportionnée au droit de propriété et une méconnaissance des principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques.

Sur le fond
En application du premier alinéa de l'article L. 1321-2 du code de la santé publique, les captages d'eau destinée à la consommation humaine doivent faire l'objet de périmètres de protection délimités par un arrêté préfectoral portant déclaration d'utilité publique en vue d'assurer la protection de la qualité de l'eau qui y est prélevée. L'arrêté préfectoral détermine autour du point de prélèvement un périmètre de protection immédiate au sein duquel les terrains font l'objet d'une expropriation au profit de la personne publique propriétaire du captage. S'y ajoute un périmètre de protection rapprochée portant sur un secteur plus vaste, à l'intérieur duquel des servitudes d'utilité publique peuvent interdire ou réglementer toutes sortes d'«installations, travaux, activités, dépôts, ouvrages, aménagement ou occupation des sols» de nature à nuire à la qualité des eaux captées.

Le deuxième alinéa de l'article L. 1321-2 du code de la santé publique, tel que modifié par le paragraphe III de l'article 61 de la loi du 24 juillet 2019, a exclu l'instauration d'un périmètre de protection rapprochée, en plus du périmètre de protection immédiate, lorsque les conditions hydrologiques et hydrogéologiques du captage permettent d'assurer efficacement la préservation de la qualité de l'eau par des mesures de protection limitées au voisinage immédiat. Les deux alinéas suivants de l'article L. 1321-2, dans cette rédaction, excluent également l'instauration d'un tel périmètre pour les captages d'eau d'origine souterraine à faible débit, sauf en cas de risque avéré de dégradation de la qualité de l'eau.

En application des dispositions contestées, ce nouveau régime ne s'applique pas aux captages d'eau pour lesquels un arrêté d'ouverture d'une enquête publique relative à l'instauration d'un périmètre de protection a été publié à la date de publication de la loi du 24 juillet 2019. Ces captages sont donc susceptibles de faire l'objet d'un périmètre de protection rapprochée, quand bien même ils répondraient aux conditions mentionnées au paragraphe précédent.

Si la différence de traitement qui résulte de la succession de deux régimes juridiques dans le temps n'est pas, en elle-même, contraire au principe d'égalité, le législateur a, en l'espèce, établi une différence de traitement entre les propriétaires de terrains situés à proximité de captages d'eau, selon qu'a ou non été publié, au jour de la publication de la loi, un arrêté d'ouverture d'une enquête publique en vue de l'éventuelle instauration d'un périmètre de protection.

Or, le critère ainsi retenu ne rend pas compte d'une différence de situation, au regard de l'objet de la loi modifiant le régime des périmètres de protection, entre les propriétaires qui ne sont pas déjà soumis à un tel périmètre. Il vise, non à éviter la remise en cause des périmètres existants, mais seulement, ainsi qu'il ressort d'ailleurs des travaux préparatoires, à dispenser les personnes publiques ayant engagé une procédure d'instauration de périmètres avant la publication de la loi d'avoir à la reprendre pour la compléter. Toutefois, compte tenu des conséquences limitées de l'application des nouvelles règles sur les procédures en cours, ce motif n'est pas de nature à justifier que les propriétaires en cause soient exclus du bénéfice de ces règles et, de ce fait, soient susceptibles de se voir imposer les servitudes afférentes à un périmètre de protection rapprochée.

Il résulte de ce qui précède que les dispositions contestées méconnaissent le principe d'égalité devant la loi. Par conséquent, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, elles doivent être déclarées contraires à la Constitution.

Les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité
La déclaration d'inconstitutionnalité intervient à compter de la date de publication de la présente décision. Elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE
Article 1er. - Le paragraphe IX de l'article 61 de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé est contraire à la Constitution.
Article 2. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées au paragraphe 11 de cette décision.

Conseil constitutionnel - Décision n° 2020-883 QPC - 2021-02-12
 




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