
En vue d'obtenir réparation de ses droits lésés, le concurrent évincé peut engager un recours de pleine juridiction tendant à une indemnisation du préjudice subi à raison de l'illégalité de la conclusion du contrat dont il a été évincé. Il appartient au juge, lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce dernier, de vérifier d'abord si l'entreprise était ou non dépourvue de toute chance de remporter le marché. Dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité. Dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre. Il convient ensuite de rechercher si l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché.
Dès lors que l'offre d'un candidat irrégulièrement évincé d'une procédure de passation d'un marché était irrégulière, ce candidat, de ce seul fait, ne peut être regardé comme ayant été privé d'une chance sérieuse d'obtenir le marché, y compris lorsque l'offre retenue était tout aussi irrégulière, et n'est pas fondé, par suite, à demander réparation d'un tel préjudice.
Dans cette affaire, la cour administrative d'appel de Lyon fait application du cadre jurisprudentiel relatif à l’indemnisation des candidats irrégulièrement évincés à l’issue d’une procédure de sélection (CE, 18 juin 2003, ETPO Guadeloupe, n° 249630 B, et CE 28 février 2020, 426162, B Régal des Isles ), dans un cas particulier. L’entreprise ici évincée, a contesté son éviction dès la fin des opérations initiales de sélection dans le cadre d’un recours «gracieux» qui est une demande au maître d’ouvrage de l’indemniser : elle fait justement valoir que l’entreprise sélectionnée est dépourvue des qualifications techniques imposées par le règlement de la consultation et que cette candidature, «irrégulière» devait être écartée.
Après avoir rejeté cette demande indemnitaire, le maître d'ouvrage MOA résilie le marché (qui, signé, n’a cependant pas encore été mis en œuvre) pour un motif avancé «d’intérêt général», relance une procédure et attribue le marché à la même entreprise qui a depuis rectifié son offre. La société Le Ny, qui n’est pas retenue au terme de cette seconde procédure à laquelle elle a également candidaté, ne la conteste pas et porte son affaire (demande indemnitaire suite à sa première éviction) au tribunal administratif de Grenoble. Ce dernier la rejette au motif, notamment, que la seconde procédure fait écran : son manque à gagner n’est en lien qu’avec sa seconde éviction, qu’elle n’a pas contestée.
La cour décide de censurer cette approche, notamment parce que la participation à un nouvel appel d’offres n’est pas, en tout état de cause, une condition opposable pour contester une éviction irrégulière d’une première procédure, et que l’hypothèse de la jurisprudence CE N° 355139 B, 19 décembre 2012 - selon laquelle le refus de mener à terme une procédure et de conclure le contrat pour un motif d’intérêt général prive le candidat évincé d’un droit à indemnité- n’est pas celle de l’espèce.
Après avoir vérifié que la société avait bien perdu une chance sérieuse selon les critères imposés lors du première appel d’offres et retenu le principe et le montant de son indemnisation, le jeu des appels en garantie (dont la cour est saisie par effet dévolutif) laisse à la charge de la commune une partie seulement de l’indemnité, qu’eu égard à ses carences dans sa mission de sélection, l’équipe du maître d'oeuvre MOE devra en bonne partie supporter.
CAA de LYON N° 19LY01887 - 2021-04-08
Dès lors que l'offre d'un candidat irrégulièrement évincé d'une procédure de passation d'un marché était irrégulière, ce candidat, de ce seul fait, ne peut être regardé comme ayant été privé d'une chance sérieuse d'obtenir le marché, y compris lorsque l'offre retenue était tout aussi irrégulière, et n'est pas fondé, par suite, à demander réparation d'un tel préjudice.
Dans cette affaire, la cour administrative d'appel de Lyon fait application du cadre jurisprudentiel relatif à l’indemnisation des candidats irrégulièrement évincés à l’issue d’une procédure de sélection (CE, 18 juin 2003, ETPO Guadeloupe, n° 249630 B, et CE 28 février 2020, 426162, B Régal des Isles ), dans un cas particulier. L’entreprise ici évincée, a contesté son éviction dès la fin des opérations initiales de sélection dans le cadre d’un recours «gracieux» qui est une demande au maître d’ouvrage de l’indemniser : elle fait justement valoir que l’entreprise sélectionnée est dépourvue des qualifications techniques imposées par le règlement de la consultation et que cette candidature, «irrégulière» devait être écartée.
Après avoir rejeté cette demande indemnitaire, le maître d'ouvrage MOA résilie le marché (qui, signé, n’a cependant pas encore été mis en œuvre) pour un motif avancé «d’intérêt général», relance une procédure et attribue le marché à la même entreprise qui a depuis rectifié son offre. La société Le Ny, qui n’est pas retenue au terme de cette seconde procédure à laquelle elle a également candidaté, ne la conteste pas et porte son affaire (demande indemnitaire suite à sa première éviction) au tribunal administratif de Grenoble. Ce dernier la rejette au motif, notamment, que la seconde procédure fait écran : son manque à gagner n’est en lien qu’avec sa seconde éviction, qu’elle n’a pas contestée.
La cour décide de censurer cette approche, notamment parce que la participation à un nouvel appel d’offres n’est pas, en tout état de cause, une condition opposable pour contester une éviction irrégulière d’une première procédure, et que l’hypothèse de la jurisprudence CE N° 355139 B, 19 décembre 2012 - selon laquelle le refus de mener à terme une procédure et de conclure le contrat pour un motif d’intérêt général prive le candidat évincé d’un droit à indemnité- n’est pas celle de l’espèce.
Après avoir vérifié que la société avait bien perdu une chance sérieuse selon les critères imposés lors du première appel d’offres et retenu le principe et le montant de son indemnisation, le jeu des appels en garantie (dont la cour est saisie par effet dévolutif) laisse à la charge de la commune une partie seulement de l’indemnité, qu’eu égard à ses carences dans sa mission de sélection, l’équipe du maître d'oeuvre MOE devra en bonne partie supporter.
CAA de LYON N° 19LY01887 - 2021-04-08
Dans la même rubrique
-
Juris - Limites du contrôle de la personne publique dans le cadre du paiement direct d’un sous-traitant : seule la consistance des travaux peut être vérifiée
-
Juris - Décompte général - L'absence de signature par l'acheteur ne fait pas fait obstacle au déclenchement du délai de contestation
-
Juris - Un document, qui n’expose pas de façon précise et détaillée les chefs de contestation du décompte général du maître d’ouvrage, ne constitue pas un mémoire en réclamation
-
Juris - Irrégularité d’une offre qui ne respecte pas les prescriptions imposées par le CCTP
-
Juris - Rappel - Le juge du référé précontractuel peut se faire communiquer le rapport d'analyse des offres