
Il résulte des articles L. 253-1, L. 253-7, L. 253-7-1, L. 253-8, R. 253-1, R. 253-45, D. 253-45-1 et D. 253-46-1-5 du code rural et de la pêche maritime ainsi que de l'article 5 de l'arrêté du 4 mai 2017 que le législateur a organisé une police spéciale de la mise sur le marché, de la détention et de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, confiée à l'Etat et dont l'objet est, conformément au droit de l'Union européenne, d'assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale et de l'environnement tout en améliorant la production agricole et de créer un cadre juridique commun pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable, alors que les effets de long terme de ces produits sur la santé restent, en l'état des connaissances scientifiques, incertains.
Les produits phytopharmaceutiques font l'objet d'une procédure d'autorisation de mise sur le marché, délivrée par l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail s'il est démontré, à l'issue d'une évaluation indépendante, que ces produits n'ont pas d'effet nocif immédiat ou différé sur la santé humaine. Il appartient ensuite au ministre chargé de l'agriculture ainsi que, le cas échéant, aux ministres chargés de la santé, de l'environnement et de la consommation, éclairés par l'avis scientifique de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, de prendre les mesures d'interdiction ou de limitation de l'utilisation de ces produits qui s'avèrent nécessaires à la protection de la santé publique et de l'environnement, en particulier dans les zones où sont présentes des personnes vulnérables.
L'autorité préfectorale est également chargée, au niveau local et dans le cadre fixé au niveau national, d'une part, de fixer les distances minimales d'utilisation des produits phytopharmaceutiques à proximité de certains lieux accueillant des personnes vulnérables, d'autre part, d'approuver les chartes d'engagements d'utilisateurs formalisant des mesures de protection des riverains de zones d'utilisation des produits et, enfin, en cas de risque exceptionnel et justifié, de prendre toute mesure d'interdiction ou de restriction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques nécessaire à la préservation de la santé publique et de l'environnement, avec une approbation dans les plus brefs délais du ministre chargé de l'agriculture.
Dans ces conditions, si les articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales habilitent le maire à prendre, pour la commune, les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, celui-ci ne peut légalement user de cette compétence pour édicter une réglementation portant sur les conditions générales d'utilisation des produits phytopharmaceutiques qu'il appartient aux seules autorités de l'Etat de prendre. Dès lors, le pouvoir de police spéciale des produits phytopharmaceutiques confié aux autorités de l'Etat fait obstacle à l'édiction, par le maire d'une commune, de mesures réglementaires d'interdiction de portée générale de l'utilisation de ces produits.
Il n'en demeure pas moins que ce cadre législatif propre à la réglementation des produits phytopharmaceutiques n'exclut pas que le maire fasse usage du pouvoir de police spéciale qu'il tire des dispositions citées au point 6 de l'article L. 541-3 du code de l'environnement, lesquelles lui permettent d'infliger des sanctions administratives destinées à contraindre le responsable de déchets abandonnés et nuisibles de procéder aux travaux nécessaires à leur élimination. Cependant, les conditions et les limites de mise en œuvre de cette police spéciale doivent nécessairement être appréciées en considération des autres polices, générales ou spéciales, concourant à la réglementation des produits susceptibles d'engendrer des nuisances pour l'environnement.
En l'espèce, le maire de la commune, après avoir relevé, dans l'arrêté en litige, que " les utilisateurs de produits phytopharmaceutiques doivent mettre en œuvre les moyens pour que ces produits ne soient pas entrainés hors des parcelles auxquelles ils sont destinés ", a estimé que " les produits phytopharmaceutiques et les substances qui les composent qui seraient rejetés hors des parcelles auxquelles ils sont destinés sont des produits dont le détendeur s'est défait ", que " ces produits et substances deviennent alors des déchets ne pouvant être réutilisés " et que " la production de déchet et leur rejet dans le domaine public ou dans des propriétés de tiers nuisent à autrui ".
Il a alors décidé dans l'article 3 de cet arrêté que " tout rejet de produits phytopharmaceutiques hors de la propriété à laquelle ils sont destinés constitue un dépôt de déchet et est interdit ".
Ce faisant, compte-tenu de ce qui a été dit aux points précédents, et alors que la commune n'établit pas l'existence de circonstances locales particulières ou l'existence d'un danger grave et imminent justifiant son intervention en se prévalant de la présence de molécules issues de produits phytopharmaceutiques dans un cours d'eau de la commune sans en justifier, l'arrêté du maire a, contrairement à ce qui est soutenu, eu pour conséquence de restreindre l'utilisation des produits phytopharmaceutiques par leurs utilisateurs en interdisant leur rejet hors de la propriété à laquelle ils sont destinés.
Incompétence du maire
Le maire n'était ainsi pas compétent au regard de ses pouvoirs de police générale qu'il tient des articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. Il n'était pas davantage compétent au regard de ses pouvoirs de police spéciale des déchets qu'il tient des articles L. 541-4 du code de l'environnement, et au regard de ses pouvoirs de police sanitaire qu'il tient des articles L. 1311-1 et suivants du code de la santé publique, pour édicter une telle mesure qui se rapporte aux conditions générales d'utilisation des produits phytopharmaceutiques qu'il appartient aux seules autorités de l'Etat de prendre.
CAA de NANTES N° 22NT02595 - 2023-10-13
Les produits phytopharmaceutiques font l'objet d'une procédure d'autorisation de mise sur le marché, délivrée par l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail s'il est démontré, à l'issue d'une évaluation indépendante, que ces produits n'ont pas d'effet nocif immédiat ou différé sur la santé humaine. Il appartient ensuite au ministre chargé de l'agriculture ainsi que, le cas échéant, aux ministres chargés de la santé, de l'environnement et de la consommation, éclairés par l'avis scientifique de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, de prendre les mesures d'interdiction ou de limitation de l'utilisation de ces produits qui s'avèrent nécessaires à la protection de la santé publique et de l'environnement, en particulier dans les zones où sont présentes des personnes vulnérables.
L'autorité préfectorale est également chargée, au niveau local et dans le cadre fixé au niveau national, d'une part, de fixer les distances minimales d'utilisation des produits phytopharmaceutiques à proximité de certains lieux accueillant des personnes vulnérables, d'autre part, d'approuver les chartes d'engagements d'utilisateurs formalisant des mesures de protection des riverains de zones d'utilisation des produits et, enfin, en cas de risque exceptionnel et justifié, de prendre toute mesure d'interdiction ou de restriction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques nécessaire à la préservation de la santé publique et de l'environnement, avec une approbation dans les plus brefs délais du ministre chargé de l'agriculture.
Dans ces conditions, si les articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales habilitent le maire à prendre, pour la commune, les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, celui-ci ne peut légalement user de cette compétence pour édicter une réglementation portant sur les conditions générales d'utilisation des produits phytopharmaceutiques qu'il appartient aux seules autorités de l'Etat de prendre. Dès lors, le pouvoir de police spéciale des produits phytopharmaceutiques confié aux autorités de l'Etat fait obstacle à l'édiction, par le maire d'une commune, de mesures réglementaires d'interdiction de portée générale de l'utilisation de ces produits.
Il n'en demeure pas moins que ce cadre législatif propre à la réglementation des produits phytopharmaceutiques n'exclut pas que le maire fasse usage du pouvoir de police spéciale qu'il tire des dispositions citées au point 6 de l'article L. 541-3 du code de l'environnement, lesquelles lui permettent d'infliger des sanctions administratives destinées à contraindre le responsable de déchets abandonnés et nuisibles de procéder aux travaux nécessaires à leur élimination. Cependant, les conditions et les limites de mise en œuvre de cette police spéciale doivent nécessairement être appréciées en considération des autres polices, générales ou spéciales, concourant à la réglementation des produits susceptibles d'engendrer des nuisances pour l'environnement.
En l'espèce, le maire de la commune, après avoir relevé, dans l'arrêté en litige, que " les utilisateurs de produits phytopharmaceutiques doivent mettre en œuvre les moyens pour que ces produits ne soient pas entrainés hors des parcelles auxquelles ils sont destinés ", a estimé que " les produits phytopharmaceutiques et les substances qui les composent qui seraient rejetés hors des parcelles auxquelles ils sont destinés sont des produits dont le détendeur s'est défait ", que " ces produits et substances deviennent alors des déchets ne pouvant être réutilisés " et que " la production de déchet et leur rejet dans le domaine public ou dans des propriétés de tiers nuisent à autrui ".
Il a alors décidé dans l'article 3 de cet arrêté que " tout rejet de produits phytopharmaceutiques hors de la propriété à laquelle ils sont destinés constitue un dépôt de déchet et est interdit ".
Ce faisant, compte-tenu de ce qui a été dit aux points précédents, et alors que la commune n'établit pas l'existence de circonstances locales particulières ou l'existence d'un danger grave et imminent justifiant son intervention en se prévalant de la présence de molécules issues de produits phytopharmaceutiques dans un cours d'eau de la commune sans en justifier, l'arrêté du maire a, contrairement à ce qui est soutenu, eu pour conséquence de restreindre l'utilisation des produits phytopharmaceutiques par leurs utilisateurs en interdisant leur rejet hors de la propriété à laquelle ils sont destinés.
Incompétence du maire
Le maire n'était ainsi pas compétent au regard de ses pouvoirs de police générale qu'il tient des articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. Il n'était pas davantage compétent au regard de ses pouvoirs de police spéciale des déchets qu'il tient des articles L. 541-4 du code de l'environnement, et au regard de ses pouvoirs de police sanitaire qu'il tient des articles L. 1311-1 et suivants du code de la santé publique, pour édicter une telle mesure qui se rapporte aux conditions générales d'utilisation des produits phytopharmaceutiques qu'il appartient aux seules autorités de l'Etat de prendre.
CAA de NANTES N° 22NT02595 - 2023-10-13
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