
Saisi de 18 articles de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, le Conseil constitutionnel censure partiellement deux d’entre eux et censure deux autres articles comme cavaliers législatifs
Par sa décision n° 2022-846 DC du 19 janvier 2023, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur des dispositions de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, dont il avait été saisi par un recours émanant de plus de soixante députés.
Le Conseil constitutionnel censure partiellement
- l’article 10 de la loi déférée, modifiant le régime applicable à l’enquête sous pseudonyme en matière d’infractions commises par la voie des communications électroniques.
- l’article 18 de la loi créant la fonction d’assistant d’enquête de la police nationale et de la gendarmerie nationale.
Le Conseil constitutionnel écarte les critiques formulées par les députés requérants contre l’article 25 étendant la liste des délits pouvant faire l’objet d’une amende forfaitaire délictuelle.
Le Conseil constitutionnel rappelle qu’il résulte des articles 6 et 16 de la Déclaration de 1789 que, si le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s’appliquent, c’est à la condition que ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales, notamment quant aux conditions d’extinction de l’action publique.
Il relève à cette aune que la procédure de l’amende forfaitaire délictuelle a pour conséquence que, selon le choix de poursuite de l’infraction par le biais de cette procédure ou d’une autre voie de poursuite pouvant le cas échéant mener à une condamnation à une peine d’emprisonnement, l’action publique relative à la commission d’un délit sera éteinte ou non, par le seul paiement de l’amende, sans l’intervention d’une autorité juridictionnelle.
Il juge que, d’une part, il découle du principe d’égalité devant la justice que, si les exigences d’une bonne administration de la justice et d’une répression effective des infractions sont susceptibles de justifier le recours à de tels modes d’extinction de l’action publique en dehors de toute décision juridictionnelle, ce n’est qu’à la condition de porter sur les délits punis d’une peine d’emprisonnement qui ne peut être supérieure à trois ans, dont les éléments constitutifs peuvent être aisément constatés, et de ne mettre en œuvre que des amendes de faible montant.
D’autre part, le Conseil constitutionnel énonce qu’il découle du principe d’égalité devant la loi pénale que la procédure d’amende forfaitaire délictuelle ne saurait s’appliquer à des délits dont le montant de l’amende forfaitaire est supérieur à la moitié du plafond prévu en matière d’amendes forfaitaires délictuelles par le premier alinéa de l’article 495-17 du code de procédure pénale.
Le Conseil constitutionnel en déduit que, en prévoyant l’application d’amendes forfaitaires dont le montant n’excède pas huit cents euros aux délits mentionnés aux paragraphes I à IX et XI de l’article 25, qui sont punis au maximum d’une peine d’emprisonnement de deux ans et dont les éléments constitutifs peuvent être aisément constatés, les dispositions contestées ne méconnaissent pas les principes d’égalité devant la justice et devant la loi pénale.
Puis, exerçant son contrôle sur le fondement de la protection de la liberté d’expression et de communication garantie par l’article 11 de la Déclaration de 1789, le Conseil constitutionnel juge que n’est pas, par elle-même, de nature à mettre en cause cette liberté l’application de l’amende forfaitaire délictuelle aux deux délits réprimés, d’une part, par l’article 431-22 du code pénal, à savoir le fait de pénétrer ou de se maintenir dans l’enceinte d’un établissement d’enseignement scolaire sans y être habilité ou y avoir été autorisé, dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement, et, d’autre part, par l’article L. 421-1 du code de la route, à savoir le fait, en vue d’entraver ou de gêner la circulation, de placer ou de tenter de placer, sur une voie ouverte à la circulation publique, un objet faisant obstacle au passage des véhicules ou d’employer, ou de tenter d’employer un moyen quelconque pour y mettre obstacle.
Il déclare donc conformes à la Constitution les dispositions contestées de l’article 25 de la loi déférée.
Le Conseil constitutionnel a par ailleurs fait droit à la critique des députés requérants qui contestaient comme revêtant le caractère de cavalier législatif l’article 15 de la loi déférée, modifiant plusieurs dispositions du code pénal, du code de procédure pénale et du code de la route afin de renforcer la répression
- des violences commises sur des personnes investies d’un mandat électif public
- de certains comportements délictuels commis à l’occasion de la conduite d’un véhicule.
Le Conseil constitutionnel relève en effet que, introduites en première lecture en dépit de réserves exprimées quant à leur rattachement au périmètre du texte initial, les dispositions de l’article 15
- ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l’article 7 du projet de loi initial qui aggravait la répression de l’outrage sexiste.
- ne présentent pas non plus de lien, même indirect, avec aucune autre des dispositions qui figuraient dans le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat.
Il juge qu’il y a lieu de constater que, adopté selon une procédure contraire à la Constitution, l’article 15 lui est donc contraire. Cette censure ne prive évidemment pas le législateur de la possibilité d’adopter un tel article dans un autre texte. Le Conseil constitutionnel ne préjuge aucunement de la conformité du contenu même de cet article 15 aux autres exigences constitutionnelles.
Le Conseil constitutionnel censure pour les mêmes motifs, d’office, l’article 26 de la loi déférée supprimant l’exigence de réitération ou de formalisation des menaces de mort pour caractériser le délit prévu à l’article 222-17 du code pénal.
Conseil constitutionnel >> Décision n° 2022-846 DC du 19 janvier 2023
Par sa décision n° 2022-846 DC du 19 janvier 2023, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur des dispositions de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, dont il avait été saisi par un recours émanant de plus de soixante députés.
Le Conseil constitutionnel censure partiellement
- l’article 10 de la loi déférée, modifiant le régime applicable à l’enquête sous pseudonyme en matière d’infractions commises par la voie des communications électroniques.
- l’article 18 de la loi créant la fonction d’assistant d’enquête de la police nationale et de la gendarmerie nationale.
Le Conseil constitutionnel écarte les critiques formulées par les députés requérants contre l’article 25 étendant la liste des délits pouvant faire l’objet d’une amende forfaitaire délictuelle.
Le Conseil constitutionnel rappelle qu’il résulte des articles 6 et 16 de la Déclaration de 1789 que, si le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s’appliquent, c’est à la condition que ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales, notamment quant aux conditions d’extinction de l’action publique.
Il relève à cette aune que la procédure de l’amende forfaitaire délictuelle a pour conséquence que, selon le choix de poursuite de l’infraction par le biais de cette procédure ou d’une autre voie de poursuite pouvant le cas échéant mener à une condamnation à une peine d’emprisonnement, l’action publique relative à la commission d’un délit sera éteinte ou non, par le seul paiement de l’amende, sans l’intervention d’une autorité juridictionnelle.
Il juge que, d’une part, il découle du principe d’égalité devant la justice que, si les exigences d’une bonne administration de la justice et d’une répression effective des infractions sont susceptibles de justifier le recours à de tels modes d’extinction de l’action publique en dehors de toute décision juridictionnelle, ce n’est qu’à la condition de porter sur les délits punis d’une peine d’emprisonnement qui ne peut être supérieure à trois ans, dont les éléments constitutifs peuvent être aisément constatés, et de ne mettre en œuvre que des amendes de faible montant.
D’autre part, le Conseil constitutionnel énonce qu’il découle du principe d’égalité devant la loi pénale que la procédure d’amende forfaitaire délictuelle ne saurait s’appliquer à des délits dont le montant de l’amende forfaitaire est supérieur à la moitié du plafond prévu en matière d’amendes forfaitaires délictuelles par le premier alinéa de l’article 495-17 du code de procédure pénale.
Le Conseil constitutionnel en déduit que, en prévoyant l’application d’amendes forfaitaires dont le montant n’excède pas huit cents euros aux délits mentionnés aux paragraphes I à IX et XI de l’article 25, qui sont punis au maximum d’une peine d’emprisonnement de deux ans et dont les éléments constitutifs peuvent être aisément constatés, les dispositions contestées ne méconnaissent pas les principes d’égalité devant la justice et devant la loi pénale.
Puis, exerçant son contrôle sur le fondement de la protection de la liberté d’expression et de communication garantie par l’article 11 de la Déclaration de 1789, le Conseil constitutionnel juge que n’est pas, par elle-même, de nature à mettre en cause cette liberté l’application de l’amende forfaitaire délictuelle aux deux délits réprimés, d’une part, par l’article 431-22 du code pénal, à savoir le fait de pénétrer ou de se maintenir dans l’enceinte d’un établissement d’enseignement scolaire sans y être habilité ou y avoir été autorisé, dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement, et, d’autre part, par l’article L. 421-1 du code de la route, à savoir le fait, en vue d’entraver ou de gêner la circulation, de placer ou de tenter de placer, sur une voie ouverte à la circulation publique, un objet faisant obstacle au passage des véhicules ou d’employer, ou de tenter d’employer un moyen quelconque pour y mettre obstacle.
Il déclare donc conformes à la Constitution les dispositions contestées de l’article 25 de la loi déférée.
Le Conseil constitutionnel a par ailleurs fait droit à la critique des députés requérants qui contestaient comme revêtant le caractère de cavalier législatif l’article 15 de la loi déférée, modifiant plusieurs dispositions du code pénal, du code de procédure pénale et du code de la route afin de renforcer la répression
- des violences commises sur des personnes investies d’un mandat électif public
- de certains comportements délictuels commis à l’occasion de la conduite d’un véhicule.
Le Conseil constitutionnel relève en effet que, introduites en première lecture en dépit de réserves exprimées quant à leur rattachement au périmètre du texte initial, les dispositions de l’article 15
- ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l’article 7 du projet de loi initial qui aggravait la répression de l’outrage sexiste.
- ne présentent pas non plus de lien, même indirect, avec aucune autre des dispositions qui figuraient dans le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat.
Il juge qu’il y a lieu de constater que, adopté selon une procédure contraire à la Constitution, l’article 15 lui est donc contraire. Cette censure ne prive évidemment pas le législateur de la possibilité d’adopter un tel article dans un autre texte. Le Conseil constitutionnel ne préjuge aucunement de la conformité du contenu même de cet article 15 aux autres exigences constitutionnelles.
Le Conseil constitutionnel censure pour les mêmes motifs, d’office, l’article 26 de la loi déférée supprimant l’exigence de réitération ou de formalisation des menaces de mort pour caractériser le délit prévu à l’article 222-17 du code pénal.
Conseil constitutionnel >> Décision n° 2022-846 DC du 19 janvier 2023
Dans la même rubrique
-
Parl. - Calendrier parlementaire - Le statut de l'élu et le scrutin de liste dans les communes de moins de 1 000 habitants examinés et « peut-être » votés avant l'été
-
Parl. - IA, territoires et proximité - Les progrès technologiques possibles suscitent l’espoir d’améliorer les processus administratifs
-
Parl. - La Fièvre parlementaire : ce monde où l’on catche ! Colère, polarisation et politique TikTok à l’Assemblée nationale - Quand les députés parlent aux réseaux sociaux
-
Parl. - PLFSS 2025 : le gouvernement remet sur la table l’idée des sept heures de travail non payées
-
Parl. - Déclaration de politique générale du premier ministre : réactions de l’APVF et de Départements de France