
Les réseaux sociaux ont bouleversé notre société et nous confrontent à des défis démocratiques, économiques, sociétaux mais aussi écologiques. Alors que l’Union européenne vient d’adopter un cadre juridique ambitieux pour leur régulation, le Conseil d’État publie son étude annuelle 2022 consacrée à ce sujet et formule 17 propositions concrètes pour permettre le rééquilibrage des forces en faveur des utilisateurs, armer la puissance publique dans son rôle de régulateur et également penser demain.
Les réseaux sociaux ont acquis en quelques années une place centrale dans le fonctionnement de nos sociétés contemporaines.
A l’évidence, ils répondent à un besoin, comme en témoigne leur succès foudroyant. Ils constituent un progrès immense pour l’expression individuelle, y compris en permettant à des personnes très éloignées voire qui ne se sont jamais physiquement rencontrées de communiquer de manière quasi instantanée et en donnant une voix à ceux qui, autrefois, parce que minoritaires ou relégués aux marges de la société, étaient condamnés au silence. Dans le même temps, le bouleversement de l’espace public par de nouveaux modes de communication aux mains d’opérateurs privés peut inquiéter car il intervient au moment même où les démocraties sont fragilisées.
La responsabilité des réseaux sociaux dans cette crise n’est d’ailleurs pas nulle.
Ils amplifient les propos provocateurs et favorisent le cloisonnement des opinions contribuant à renforcer les divisions. Ils nourrissent des représentations biaisées du monde et, en faisant plonger l’individu dans le grand bain de « la société du spectacle », alimentent les frustrations.
Pour autant, peut-on aller jusqu’à dire que la démocratie ne pourrait pas prospérer dans un environnement où chacun s’expose et prend la parole ? Que l’expression de tous ne pourrait que mener au chaos ? Que les passions qui s’expriment ne pourraient jamais conduire à faire émerger le bien commun ? Ne faut-il pas plutôt faire un pas en arrière et prendre du recul par rapport à cette révolution ? A l’échelle de la société, une nouvelle forme de débat public plus éclairé et plus égalitaire est à construire.
A l’échelle de l’individu, accompagner le changement à l’œuvre pour se prémunir du pire et profiter du meilleur est un objectif ambitieux mais qui semble accessible. L’usage des réseaux sociaux, désormais central, comme leur régulation, doivent être pleinement compatibles avec notre modèle démocratique.
C’est le défi ambitieux et stimulant que tentent de relever l’Union européenne et la France avec l’adoption des règlements Digital services Act et Digital Markets Act. Lutter contre les propos illicites, exiger des opérateurs loyauté et transparence, astreindre les très grandes plateformes à des obligations supplémentaires notamment en matière de modération afin de garantir la liberté d’expression, permettre un accès sécurisé aux algorithmes et aux données dans le cadre de recherches et d’audits, imposer des prescriptions en amont pour limiter les concentrations et les abus de position dominante, garantir un marché équitable, tels sont les objectifs que fixent le DSA et le DMA et qu’il conviendra de prochainement mettre en œuvre.
Le Conseil d’État propose d’aller plus loin, en cohérence avec le cadre juridique qui vient d’être défini au niveau de l’Union européenne.
Ses recommandations s’articulent autour de trois axes :
- rééquilibrer les rapports de force en faveur des utilisateurs,
- armer la puissance publique pour réguler et optimiser l’usage des réseaux sociaux sans oublier la sauvegarde de la souveraineté et la dimension environnementale,
- penser les réseaux sociaux de demain.
Il n’existe pas de solution miracle mais une multitude d’actions à différents niveaux qui supposent toutes la responsabilisation de l’ensemble des acteurs et notamment des utilisateurs.
Jurgen Habermas soutient que la publicité immédiate de la parole intime et privée conduit à l’érosion des critères de rationalité qui structuraient jusqu’alors l’espace public et ainsi à une régression politique. Faut-il se résoudre à pareil constat ? Ne convient-il pas de démontrer que cette sagace analyse est empreinte de pessimisme et qu’il est encore temps d’inverser le mouvement ?
La balle est dans le camp des opérateurs qui sont parties prenantes au processus de régulation, de la puissance publique qui se met en ordre de marche mais aussi des utilisateurs qui doivent raisonner leur usage pour faire des réseaux sociaux un outil au service de tous et non un instrument d’asservissement.
Conseil d’Etat >> Etude annuelle 2022
Les réseaux sociaux ont acquis en quelques années une place centrale dans le fonctionnement de nos sociétés contemporaines.
A l’évidence, ils répondent à un besoin, comme en témoigne leur succès foudroyant. Ils constituent un progrès immense pour l’expression individuelle, y compris en permettant à des personnes très éloignées voire qui ne se sont jamais physiquement rencontrées de communiquer de manière quasi instantanée et en donnant une voix à ceux qui, autrefois, parce que minoritaires ou relégués aux marges de la société, étaient condamnés au silence. Dans le même temps, le bouleversement de l’espace public par de nouveaux modes de communication aux mains d’opérateurs privés peut inquiéter car il intervient au moment même où les démocraties sont fragilisées.
La responsabilité des réseaux sociaux dans cette crise n’est d’ailleurs pas nulle.
Ils amplifient les propos provocateurs et favorisent le cloisonnement des opinions contribuant à renforcer les divisions. Ils nourrissent des représentations biaisées du monde et, en faisant plonger l’individu dans le grand bain de « la société du spectacle », alimentent les frustrations.
Pour autant, peut-on aller jusqu’à dire que la démocratie ne pourrait pas prospérer dans un environnement où chacun s’expose et prend la parole ? Que l’expression de tous ne pourrait que mener au chaos ? Que les passions qui s’expriment ne pourraient jamais conduire à faire émerger le bien commun ? Ne faut-il pas plutôt faire un pas en arrière et prendre du recul par rapport à cette révolution ? A l’échelle de la société, une nouvelle forme de débat public plus éclairé et plus égalitaire est à construire.
A l’échelle de l’individu, accompagner le changement à l’œuvre pour se prémunir du pire et profiter du meilleur est un objectif ambitieux mais qui semble accessible. L’usage des réseaux sociaux, désormais central, comme leur régulation, doivent être pleinement compatibles avec notre modèle démocratique.
C’est le défi ambitieux et stimulant que tentent de relever l’Union européenne et la France avec l’adoption des règlements Digital services Act et Digital Markets Act. Lutter contre les propos illicites, exiger des opérateurs loyauté et transparence, astreindre les très grandes plateformes à des obligations supplémentaires notamment en matière de modération afin de garantir la liberté d’expression, permettre un accès sécurisé aux algorithmes et aux données dans le cadre de recherches et d’audits, imposer des prescriptions en amont pour limiter les concentrations et les abus de position dominante, garantir un marché équitable, tels sont les objectifs que fixent le DSA et le DMA et qu’il conviendra de prochainement mettre en œuvre.
Le Conseil d’État propose d’aller plus loin, en cohérence avec le cadre juridique qui vient d’être défini au niveau de l’Union européenne.
Ses recommandations s’articulent autour de trois axes :
- rééquilibrer les rapports de force en faveur des utilisateurs,
- armer la puissance publique pour réguler et optimiser l’usage des réseaux sociaux sans oublier la sauvegarde de la souveraineté et la dimension environnementale,
- penser les réseaux sociaux de demain.
Il n’existe pas de solution miracle mais une multitude d’actions à différents niveaux qui supposent toutes la responsabilisation de l’ensemble des acteurs et notamment des utilisateurs.
Jurgen Habermas soutient que la publicité immédiate de la parole intime et privée conduit à l’érosion des critères de rationalité qui structuraient jusqu’alors l’espace public et ainsi à une régression politique. Faut-il se résoudre à pareil constat ? Ne convient-il pas de démontrer que cette sagace analyse est empreinte de pessimisme et qu’il est encore temps d’inverser le mouvement ?
La balle est dans le camp des opérateurs qui sont parties prenantes au processus de régulation, de la puissance publique qui se met en ordre de marche mais aussi des utilisateurs qui doivent raisonner leur usage pour faire des réseaux sociaux un outil au service de tous et non un instrument d’asservissement.
Conseil d’Etat >> Etude annuelle 2022
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